Sauf par quelques happy few, le manuscrit de Namur
sur l'Apocalypse (Ms 77) est aussi mondialement ignoré que la
tenture d'Angers, sur le même livre biblique, n'est universellement
connue. Pourtant, selon certains historiens sérieux, le premier
- oeuvre d'un artiste anonyme et daté de 1320-1330 - a
sans doute influencé la seconde réalisée - à la demande du duc
Louis d'Anjou - vers 1380 dans les ateliers de Nicolas
Bataille d'après les cartons de Hennequin de Bruges. Il faudrait
dire « était » ignoré, puisqu'aujourd'hui, un somptueux ouvrage
rend ce manuscrit enfin accessible au large public. Les
85 miniatures peintes et enluminées qui illustrent le texte
latin (Vulgate) du manuscrit sont magnifiquement reproduites
dans leur intégralité et dans certains de leurs détails par le
travail du photographe Guy Focant. Pour accompagner ces
illustrations, Joël Rochette, prof. au Séminaire de Namur (celui-là
même qui, pendant des siècles, a conservé dans sa bibliothèque ce
fameux manuscrit) propose un commentaire du dernier livre de la
Bible selon son texte grec original, mais en conservant le
découpage voulu par l'artiste et donc imposé par les illustrations.
Les miniatures 1 à 7, p. ex., qui constituent la première étape,
nous font lire Ap 1,1-5,14 ; les suivantes (8 à 17)
accompagnent la lecture de 6,1-8,6 ; 18 à 32 : 8,7-11,18 ; 33 à
53 : 11,19-15,4 ; 54 à 61 : 15,5-16,21 ; 62 à 78 : 17,1-21,1 ; 79 à
85 : 21,2-22,21. Les spécialistes de l'Apocalypse - pour
autant qu'ils soient d'accord sur le sujet - reconnaîtront que
cette organisation ne respecte pas tout à fait les divisions et
l'architecture du livre en général admises, mais il faut y voir, de
la part du commentateur moderne une marque de respect pour le
travail de l'interprète ancien. Un seul regret : un ouvrage d'une
telle richesse aurait bien mérité une couverture rigide et une
reliure digne de ce nom. - D. Luciani