En 1972 avait paru à Rome, sous la dir. du
p. L. Saggi, Santi del Carmelo. Voici, cette
fois en langue française, une présentation selon la suite du
calendrier liturgique de tous les saints et bienheureux de l'Ordre
reconnus officiellement par l'Église. Fruit de la collaboration des
deux branches carmélitaines, cet ouvrage comble heureusement une
attente. Les exigences historiques et critiques ne sont pas
négligées, la perspective spirituelle est riche et profonde. Loin
sont les conflits stériles du passé : les carmes peuvent pleinement
reconnaître en Élie le modèle de leur vie contemplative. Leur
charisme consiste à l'imiter dans son zèle pour le service de Dieu
mais aussi dans sa solitude à Kérith. Ce que l'on sait de
St Albert de Jérusalem fait l'objet d'une synthèse judicieuse.
Il y apparaît, par sa révision du propositum des
premiers ermites du Mont Carmel, réécrit en grande partie par lui
dans la Formula vitae, comme le créateur d'un des
grands textes de la tradition catholique. En réorganisant la
branche féminine de l'Ordre et en exerçant une activité
réformatrice dont l'idéal n'était pas différent de celui que
poursuivra un jour Thérèse d'Avila, le Bx Jean Soreth doit
être considéré dans la ligne de ce que fera la Madre.
Les pages qui présentent St Jean de la Croix font justement
remarquer la nécessité de clés de lecture pour le bien comprendre.
Il faut, en chacune des oeuvres du saint, « conserver l'unité
indivisible de poésie et de commentaire » qui sont pour lui comme
« deux moyens de mettre à notre portée la richesse intraduisible de
la communication entre Dieu et l'homme ». Surtout, on insiste fort
à propos pour que la doctrine sanjuaniste ne se ramène pas à la
mise à mort de la nature et à la mortification, mais soit comprise
à la lumière de son enseignement ni comme nuit ni comme rien, mais
comme amour. On trouvera dans ce livre encore bien d'autres
portraits lumineux des grands saints et des grandes saintes de
l'Ordre, qui vérifient ce que déclarait Edith Stein : « c'est notre
vocation d'être présent pour tous devant Dieu. »
Quelques observations s'imposent toutefois à l'examen de cet
ouvrage. Il serait bon d'en revoir le texte dont la langue
française laisse plus d'une fois à désirer. À maintes reprises, on
a utilisé le terme « carmélite » au lieu de carme ou de
carmélitain ; on rencontre « platonique » au lieu de platonicien,
etc. Certains lecteurs auraient souhaité trouver aussi dans ce
livre une mention, avec une très brève notice, des saints et des
bienheureux du Carmel non reconnus officiellement. De même, la
liste des causes de béatification en cours aurait été la bienvenue.
En ce qui concerne St Nuno Álvares, chevalier avant de devenir
carme, n'aurait-il pas fallu nous dire s'il avait été « prieur de
notre Ordre » comme l'affirme le missel de l'Ordre de Malte au
1er avril ? Toutefois, ce que regrette le plus le
lecteur de ce « grand livre » c'est le nombre surprenant des
oublis : en sont absents les tertiaires du Carmel
St Jean-Paul ii, St Josemaría Escrivá de Balaguer, le
Bx Georg Häfner, prêtre allemand martyr à Dachau, Ste
Euphrasie du Sacré-Coeur de Jésus, religieuse syro-malabare de la
mère du Carmel, la Bse Victoria Diez, martyre en Espagne de
l'Institution thérésienne. On n'y trouve pas davantage le
Bx Luc de Saint-Joseph et ses 13 compagnons, 4 Bses
carmélites missionnaires et la Bse Apollonia du Saint-Sacrement,
carmélite de la charité, martyrs en Espagne. A également été
oubliée la Bse Marie-Joséphine Catanea, carmélite à Naples.
Peut-être même, malgré les vicissitudes de leur vocation,
pourrait-on y ajouter Ste Teresa Jornet e Ibara et la Bse Piedad de
la Cruz Ortiz Real. - H. Jacobs s.j.