Première traduction en langue moderne (par René Amacker, de Genève)
de ce qui survit de l'Apologie pour Origène, composée, entre 307 et
310, par Pamphile et Eusèbe de Césarée: le premier des six livres
qu'elle comportait, présenté, en 397, en traduction latine par
Rufin d'Aquilée, qui l'a encadré d'une courte préface et d'un
opuscule Sur la falsification des livres d'Origène (allusion à un
procédé dont Origène lui-même s'est plaint). Les deux tiers de
l'Apologie ne nous sont pas autrement connus. Toutes ces citations
sont tirées (à une exception près) de traités (Peri Archôn, 28
citations, qui ne se retrouveront pas identiquement dans la
traduction de l'ouvrage que Rufin publiera quelques mois plus tard;
De Resurrectione) et de commentaires: en tout, quinze ouvrages
«privés». Rufin affirmant avoir intentionnellement exclu les
ouvrages «publics» (homélies), où Origène aurait pu être tenté de
camoufler sa pensée. Après avoir exposé la position trinitaire
d'Origène, les auteurs réfutent une dizaine d'accusations portées
contre lui, concernant la vérité de l'histoire dans l'Écriture, la
résurrection des corps, la préexistence des âmes (un sujet auquel
Pamphile ajoute ses considérations personnelles), la «métensomatose
», une théorie qu'Origène a discutée, sans la soutenir. Retenons le
beau développement sur les «actions du Christ accomplies selon le
sens corporel » (circoncision, digestion…) Plusieurs questions
demeurent: pour qui et contre qui Pamphile et Eusèbe ont-ils
composé leur Apologie? Quel a été, dans le travail de rédaction, le
rôle de chacun? Que contenaient les tomes II-VI? Rufin, qui, dans
sa traduction, ne cite nommément aucun des adversaires d'Origène,
a-t-il adéquatement reproduit leurs accusations? En quel sens
a-t-il pu interpoler le texte grec? Jérôme, auteur d'une Apologie
contre Rufin, affirme qu'il a gommé les traits d'hérétique
d'Origène. Toutes ces questions sont traitées dans un deuxième tome
par Éric Junod, de Lausanne. - P. Detienne, S.J.