Au fil de la foi. 1. Le chemin de l'Écriture. 2. Le pas à pas de la vie

Fr. Quéré
Holy Scripture - reviewer : Jean Radermakers s.j.
Trop tôt disparue en 1995, le vendredi saint, la célèbre théologienne protestante France Quéré nous laisse une littérature abondante et de grande qualité sur l'Écriture et la spiritualité chrétienne. Heureusement une équipe s'est mise en place, soucieuse de préserver ce précieux patrimoine. Aussi applaudissons-nous à la parution de ce magnifique ouvrage en deux tomes. Ces volumes, édités avec grand soin, donnent une excellente idée de la pensée et de la sensibilité de cette femme admirable.
Préfacé par Ch. Blanchet, qui a largement contribué à l'édition de cet ouvrage, comme à celui de l'A. sur Marie, le premier tome nous fait parcourir avec elle Le chemin de l'Écriture. Tout commence avec la création, explosion de la vie qui s'exprime dans le don mutuel de l'homme et de la femme, image de l'Alliance de Dieu avec Israël et l'humanité entière. Après cette première approche, apparaît la lumière fulgurante de la rencontre personnelle avec le Christ. C'est chez Marie que l'A. trouve son inspiration, dans son oui à la grâce: le visage d'un Dieu toujours nouveau contemplé dans la chair fragile d'un enfant qui mourra crucifié. Et voici que tous les enfants du monde sont convoqués autour de lui pour dire l'amour, la grâce, la joie de Dieu. Et c'est dans son corps d'homme que le Christ dévoile son identité divine, alors que «l'homme n'est pas plus visible que Dieu». Se laisser transfigurer par celui qui nous donne d'être humains, c'est goûter l'âpre allégresse des Béatitudes. «Jésus était-il heureux?» s'interroge France. Or c'est son portrait que forgent les Béatitudes, et son bonheur, c'est d'aller vers les souffrants avec ses mains qui guérissent.
Cette rencontre du Christ, l'A. la vit en femme. Elle se fait proche de ses compagnes en féminité pour traduire l'attitude de Jésus envers elles: «Simon, regarde cette femme…» - «Partout dans le monde… on redira ce qu'elle a fait pour moi, en mémoire d'elle…» Mais notre vie a une fin, et c'est «face à la mort» que nous place la troisième partie du livre: la mort du Christ abandonné de tous et de Dieu, celle de Lazare où Jésus lit déjà la sienne. «Où donc est Dieu?», s'écrie-t-elle. La réponse vient, doucement: en contemplant le Crucifié, la servante et Pierre pleurant, le bon larron et la femme de Pilate, le miracle de l'amour dans la mort du Christ en croix. Enfin, soudain, s'ouvre l'espérance infinie, incroyable: la femme et l'homme rencontrent le Vivant. «Tout amour est apparition», titre l'A., qui déploie les sentiments de Marie de Magdala face au Ressuscité. Oui, l'espérance traverse la mort: elle «lance une arche par-dessus le sensible, et nous suggère que les traits de ceux que nous aimons sont, quoique invisibles, ineffaçables, et même transfigurés» (p. 343). Cette parole, qu'elle prononça à Lourdes le 1er mai 1992, nous pouvons la répéter de France elle-même, qui rayonne dans la gloire du Christ de cet amour transfiguré.
Après cette trajectoire à travers la vie de Jésus, un second tome s'ouvre à notre lecture: Les chemins de la vie, préfacé par le pasteur M. Leplay; parcours de la vie des hommes et des sociétés, dans l'Église et le monde. Comment les hommes se rencontrent-ils? Il faut d'abord partir, en route avec Dieu, dans la foi. Alors c'est le choc frontal: la souffrance, l'épreuve dans toute son horreur, avec, tout au bout, le rai de lumière du pardon, «cette espérance rendue à l'autre». C'est, avec la modernité, la radicale mise en question de la foi. Comment la vivre, comment l'annoncer? Et comment réagit l'Esprit Saint au sein de la modernité? Oser dire Jésus Christ? Cette foi en Lui ne peut se vivre que dans les rapports avec le prochain: tolérance? Mais laquelle et jusqu'où? «Pratique évangélique de la rencontre» comme réconciliation au-delà des divisions, dans l'attitude du bon Samaritain, image de Jésus. Rencontre personnelle, mais aussi en Église, en communauté non fermée mais «les mains ouvertes», dans un oecuménisme réfléchi et vécu: la paix, sans exclusion, dans le rassemblement en corps, autour du Corps du Christ. Quel est l'avenir de l'oecuménisme, du protestantisme? Voilà que France nous fait entrer, la nuit, dans le coeur de Notre-Dame, immense cathédrale «où Dieu et les hommes se sont enfin rejoints, comme les deux mains d'une orante» (p. 330). Le parcours s'achève avec une prière à l'Esprit Saint: «Béni sois-tu, Esprit, de chuchoter à tout homme qu'il est le Bien-Aimé de Dieu…» (p. 331). La postface du P. G. Martelet résume admirablement le cadeau que l'A. continue de faire à l'Église et aux hommes de ce temps à travers ce parcours magnifiquement balisé par les éditeurs.
Merci à l'A. dont l'archet ne s'est pas tu puisqu'il vibre encore dans ces pages retrouvées, échos de ses conférences, de ses chroniques dans La Croix, Panorama ou Réforme, d'entretiens particuliers. D'au-delà de la tombe, elle nous appelle encore à croire, aimer, espérer. Laissez ensemencer votre coeur par ces paroles qui font vivre et qui apaisent! Elles porteront fruit. - J.

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