Quand on désire pénétrer dans l'oeuvre du Card. de Lubac, il n'est
pas si facile d'en choisir le portail d'entrée : l'Écriture sainte,
la patristique, l'ecclésiologie, la sacramentaire, la théologie
fondamentale, la missiologie ? Bertrand Dumas, directeur du centre
théologique de Meylan (Grenoble), a discerné chez le jésuite la
voie unifiante de la mystique, selon l'orientation adoptée par sa
thèse Mystique et théologie d'après Henri de Lubac,
publiée en 2013 (cf. NRT 136, 2014, p. 672) et
dont il livre ici une sorte de résumé se voulant accessible au
non-spécialiste, comme le signale notamment le format du livre et
l'absence de notes dans cette collection de théologie mystique. On
en conseillera cependant la lecture moins aux apprentis-théologiens
qu'à ceux qui ont déjà une bonne connaissance de la pensée du
Card., car cette bouillonnante « traversée de son oeuvre » est plus
suggestive qu'apéritive et suscitera le dialogue théologique tout
autant qu'elle offre une propédeutique à la rencontre priante avec
Dieu. Certes, on retrouve le style et la visée d'H. de Lubac
et on est heureux de lire que « la théologie est toute tournée vers
la vie spirituelle » (p. 128), mais on n'oubliera pas
l'enracinement de cette pensée dans la mystique ignatienne, qui
mériterait d'être soulignée ici. Au coeur de la théologie comprise
comme « école d'active passivité » (p. 129), il y a en effet
la Tradition du Christ réfléchie tout au long de l'oeuvre
lubacienne à l'intérieur d'une théologie de l'histoire. L'Alliance
est nouée et renouvelée dans le corps même de l'Église. C'est ce
qui donne à cette pensée sa brûlante actualité (et ce qui a suscité
aussi ses critiques). La vie spirituelle, qui porte la théologie,
ne peut pas ne pas être missionnaire, de même que le souci
missionnaire ne peut être délié de son âme qui est l'Esprit. Et
c'est sans doute une des conversions (voir la préf. du Card.
Barbarin) auxquelles tout théologien est invité. - A. Massie
s.j.