Un professeur de latin à la Faculté des Lettres de l'Université de
Genève s'est épris du commentaire de Jérôme sur le livre de
Qohélèt. Il nous en donne une traduction fidèle et élégante,
assortie d'une remarquable introduction, d'abondantes notes et d'un
guide thématique. Tâche doublement ardue en raison du caractère
rugueux et peu amène de l'exégète ancien et de la difficulté de
l'oeuvre choisie. L'A. n'est pas tendre pour l'ermite de Bethléem,
un «ascète… que son tempérament d'affectif fusionnel empêche de
s'abstraire du monde et de son aventure personnelle» (p. 8). Il
décrit son exégèse comme un «mysticisme biblique», ou comme «la
méditation toujours progressante d'un contemplatif. Une méditation
simple, libre de structures, dépouillée des inutilités littéraires.
Il y a de la lectio divina dans ce commentaire» (p. 9).
L'introduction de 50 pages sur la vie et l'exégèse de Jérôme
(347-419) est un petit chef-d'oeuvre; elle mérite le détour. Dans
son commentaire, Jérôme explique le texte verset par verset. Les
notes explicatives permettent de situer les allusions de l'A. et de
comprendre la portée du texte. Jérôme manie parfaitement l'un et
l'autre Testaments, car c'est un fin connaisseur de l'Écriture dans
sa totalité et son unité. Il cueille pour nous le fruit de sa
rumination personnelle, foisonnante, peu accueillante à l'esprit du
monde. Après avoir donné son attention à la «lettre» du texte, il
en déploie le sens spirituel, qui parfois nous déroute. Et l'auteur
de la traduction de nous faire découvrir tout à la fois la
réflexion de Jérôme et le livre de l'Ecclésiaste, nous ouvrant un
monde d'interprétation. Ce livre nous éclaire sur la réception
chrétienne d'un texte de sagesse réputé désabusé et pessimiste; la
relecture qu'en fait Jérôme à la lumière du Christ est vraiment
intéressante. Nous lui souhaitons de nombreux utilisateurs. Ils ne
seront pas déçus, car ils trouveront dans l'éditeur un guide
expérimenté. - J. Radermakers, S.J.