Le mot «zèle» a été souvent utilisé, le plus souvent de manière
polémique, dans toutes les controverses religieuses entre chrétiens
du XVIe au XVIIe s., entre catholiques et protestants, bien sûr,
mais aussi entrejansénistes et jésuites. Or, aucune étude un peu
sérieuse de ce concept n'avait jamais encore été fournie; c'est
désormais chose faite avec ce volume qui reprend une bonne douzaine
de contributions à un colloque tenu en 2011 à l'initiative de
plusieurs institutions françaises à haut niveau scientifique, dont
l'EPHE (section des sciences religieuses) et l'École normale
supérieure de Lyon.Ce qui est frappant et revient dans nombre de
ces contributions, c'est l'ambivalence fondamentale de ce mot
«zèle»; si le terme apparaît dès l'Ancien Testament, avec la
fameuse phrase du Ps 69: «le zèle de ta maison me dévore» reprise
dans l'évangile selon saint Jean (2,14-17) ou celle d'un prophète
Élie découragé répondant à Dieu à l'Horeb: «J'ai déployé mon zèle
pour l'Éternel» (p. 243, p. ex.), les Pères de l'Église insistent
sur le double sens possible; ainsi, St Ambroise qui va
distinguer«deux sortes de zèles, un qui conduit à la vie et l'autre
qui mène à la mort» (p. 150). Cette ambivalence persistera tout au
long des siècles étudiés dans les différentes petites monographies
de cet ouvrage, chacune s'attachant à un point précis, comme il est
de mise dans un colloque.Ainsi, on trouvera une étude intéressante,
et parfois un peu amusante, de l'habit ecclésiastique (soutane,
surplis et même couronne de cheveux) vu comme mise en pratique du
zèle pour Dieu (chap. 5). Plus loin seront pris en compte le zèle
exprimé dans les récits de conversion entre 1573 et 1685, du
catholicisme au protestantisme ou inversement (chap. 6), et le zèle
des saints dans les hagiographies du milieu du XVIIe au milieu du
XVIIIe siècle (chap. 7). F. Trémolières considère l'«amour-propre
déguisé en zèle» chez un grand auteur catholique de la période, en
l'occurrence Fénelon (chap. 8). Les derniers chapitres, eux,
s'intéressent davantage à des figures de la Réforme: le zèle dans
les sermons et les commentaires bibliques de Calvin (chap. 9), le
zèle du pasteur dans le Traité de la dévotion de Pierre Jurieu
(chap. 11), le zèle «matrice d'une homilétique combative» chez le
prédicateur du désert C. Brousson (chap. 12), enfin, le «vrai et le
faux zèle» chez les trois Rabaut, pasteurs d'origine nîmoise: Paul
Rabaut et ses fils Rabaut-Saint-Étienne et Rabaut-Pomier (chap.
13).- D. Roure