Dans l'ensemble de son oeuvre, Cl. Geffré analyse «le tournant
herméneutique de la théologie» (sous-titre de Croire et
interpréter, 2001) afin d'en mesurer les conséquences pour la foi
et pour le travail du théologien qui entreprend de repenser Le
christianisme au risque de l'interprétation (1983). Cette
préoccupation centrale se retrouve dans ses multiples contributions
à la théologie du pluralisme religieux. Alors que la modernité
marque l'avènement de la raison critique et de la raison
démocratique, comment éviter le relativisme ou l'irénisme
complaisant (348s.) sans céder pour autant au fondamentalisme ou à
une sacralisation de la vérité qui risque de légitimer les
violences? Le recueil que voici rassemble 18 articles ou
participations à des volumes collectifs. Trois de ces textes sont
encore à paraître par ailleurs. Les quinze autres, publiés entre
1992 et 2005, ont fait ici l'objet d'un «très gros travail de
refonte et de réécriture» (11).L'ouvrage est construit en trois
temps. Alors que le pluralisme religieux met en cause la prétention
chrétienne à l'unicité et l'universalité, l'A., tout en estimant
qu'il faut prendre au sérieux les salutaires mises en garde
formulées dans Dominus Jesus, entreprend de démontrer qu'il est
possible de «concilier l'universalité pour le salut du mystère du
Christ avec un véritable pluralisme inclusif» (10). Ces positions,
développées dans la 1ère partie («Il n'y a pas d'autre Nom»),
paraissent fort proches de celles d'un Jacques Dupuis. Cl. Geffré
reproche cependant à ce dernier d'envisager «une certaine
complémentarité entre la singularité de la révélation chrétienne et
les vérités partielles des autres traditions religieuses»,
préférant quant à lui parler d'une «possible réinterprétation
créatrice de la vérité chrétienne à partir des autres vérités
religieuses» (55 n. 2). C'est dans cette perspective que la 2e
partie de l'ouvrage est intitulée «Pour une théologie
interreligieuse» (ou encore «dialogique»): les illustrations
concrètes qu'elle propose d'une telle «fécondation mutuelle»
s'inspirent principalement de la rencontre de la foi chrétienne
avec l'islam. La dernière partie aborde divers thèmes regroupés
autour de l'axe de la mission et de l'inculturation. (Il est
dommage que, dans l'épilogue [352], deux notions empruntées aux
univers bouddhique et confucéen aient été estropiées: lire ahimsâ
et ren.) - J. Scheuer sj