Nous regroupons ici ces trois titres car, en dépit de sujets
apparemment différents, ils se rejoignent sans doute par la
thématique de ce que l'on appelle couramment de nos jours
l'«inculturation», ou peut-être plus exactement une attention
focalisée sur des questions qui peuvent sembler être celles d'un
moment mais qui en réalité demeurent d'actualité encore
aujourd'hui. Inutile de présenter longuement G.-M. Riobé et H.
Camara. Pourquoi les avoir réunis au cours d'un colloque tenu à
Orléans en novembre 2009, alors qu'ils étaient à la tête de
diocèses qui connaissaient des situations bien différentes et
qu'ils intervinrent dans des débats tout aussi différents:
objection de conscience pour les militaires, célibat du clergé
séculier, armement nucléaire, justice sociale et évangile, etc.?
C'était l'occasion d'avoir une meilleure approche de leurs prises
de position, notamment en revisitant certains de leurs textes
majeurs, de mieux percevoir que le ministère épiscopal revêt un
caractère prophétique qui se doit d'être attentif aux
problématiques de chaque époque à la lumière de l'Évangile, et que
ce ministère épiscopal comporte une responsabilité de l'Église
universelle, laquelle peut trouver des intuitions importantes dans
la vie des Églises locales ou à tout le moins des points de départ
de réflexion qu'on ne peut balayer d'un revers de la main, même si
parfois elles revêtent une part d'utopie. Medellin: on sait assez
le retentissement de l'assemblée du CELAM qui s'y tint en 1968 avec
tous les avatars qui suivirent, en particulier dans le domaine de
la théologie de la libération. Certes, le paysage ecclésial
latino-américain a connu bien des changements. Il n'en reste pas
moins que la «pauvreté» et la «justice» demeurent encore et
toujours des exigences fondamentales de l'Évangile et que les
terres des Amériques, centrale et méridionale, sont confrontées à
des situations pour le moins scandaleusement pauvres et injustes
que la conférence d'Aparecida (2007) ne pouvait nullement éluder,
même s'il convient de s'adapter à un monde en perpétuelle mutation.
Il me semble qu'une question revient sans cesse sur le devant de la
scène: dans un monde qui a remis en avant, à juste titre, les
valeurs de la vie sur terre - position que l'Église a aussi faite
sienne en particulier depuis Vatican II - comment comprendre et
vivre ces valeurs en lien intrinsèque avec le «monde à venir»? Avec
le «Journal d'une fraternité», on est transporté dans les années
cinquante. Trois Petites soeurs de Jésus vivent au milieu des
Tapirapé, tribu établie dans une des régions les plus pauvres du
Brésil et qui compte alors à peine une cinquantaine de personnes.
Comme en témoigne le journal qui couvre les années 52 à 54,
l'expérience fut rude. Que faire pour, à la fois, respecter les
exigences propres à l'un des modes de la vie religieuse chrétienne,
partager l'Évangile tout en respectant ces personnes et leurs
univers religieux et culturel propres? À sa manière, ce témoignage
recueilli au jour le jour n'est pas sans rappeler l'antique
expérience des Jésuites et des réductions d'Amérique latine, dont
le célèbre film Mission a popularisé avec bonheur l'originalité et
la beauté. Trois livres donc qui donnent à réfléchir et qui
invitent, même si l'on n'est pas directement impliqué dans les
problématiques abordées, à y être attentif de près. - B. Joassart
sj