«Un séminariste atypique». Le qualificatif utilisé dans ce titre du chap. 5 aurait sûrement pu être appliqué à toute la vie de J.F. (1903-1972), qui finalement ne recevra le sacerdoce qu'en 1968 - il a alors 65 ans -, disant le jour de son ordination: «J'ai attendu l'âge de la retraite pour régulariser une vieille liaison», et ajoutant le lendemain, lors de sa première messe: «J'ai choisi autrefois le laïcat alors que c'était une aventure, voilà que je deviens prêtre au moment où c'est une aventure» (p. 437).Tout a pourtant commencé «normalement» pour ce natif de Lyon: une enfance fortement imprégnée de la foi chrétienne, le désir tôt ressenti du sacerdoce. Non pas que les moments d'avant le séminaire aient manqué de difficultés, telle la rencontre avec la dure réalité du colonialisme lors du service militaire en Tunisie, ou encore la tentation du rejet de la foi chrétienne. Mais enfin, en dépit de l'opposition paternelle, intervient l'entrée au séminaire. L'état clérical ne le détourne pourtant pas de ses premières expériences sociales et spirituelles: la fondation des Compagnons de Saint François et la fréquentation de Marc Gonin, fondateur de la Chronique sociale, tout autant que celle de Marc Sangnier, demeurent au premier plan de son existence.
Et au terme de sa formation ecclésiastique, c'est l'état laïc qui est choisi par Folliet. À partir de là, les carrières, si l'on peut dire, de ce docteur en philosophie et en sociologie, formé aussi en théologie, seront nombreuses: secrétaire de rédaction de Sept, puis de Temps présent, avant de se consacrer principalement à la Chronique sociale. Mobilisé en 1939, fait prisonnier après les hostilités, il est libéré en 1942 et entre peu à peu en résistance, collaborant entre autres à la diffusion des Cahiers du témoignage chrétien, et fondant l'Institut social des facultés catholiques de Lyon. Au lendemain de la guerre, méfiant devant l'épuration et partisan de la réconciliation de l'Allemagne et de la France, il lance la Vie catholique illustrée avec Georges Hourdin en même temps qu'il devient secrétaire des Semaines sociales. Journaliste, écrivain, historien à ses heures passionné par l'histoire de sa ville natale et de sa région, grand voyageur, il sera expert dans la commission du schéma XIII de Vatican II, et renouera peu à peu avec le désir du sacerdoce qu'il recevra au sein de la famille du Prado.
Une carrière atypique. Certes. Mais cet atypisme ne fut toutefois pas une originalité voulue pour elle-même, cultivée par pure excentricité. Bien au contraire. Car en suivant l'existence de F. dans ses méandres, le lecteur rencontre un homme pour qui la vie humaine fut chose sérieuse, à cause précisément de sa foi, sans pour autant qu'il se prît trop au sérieux - l'humour était une composante essentielle de sa personnalité. Les nombreux extraits de ses oeuvres permettent d'ailleurs de percevoir ce sérieux. D'autre part, ce livre permet de (re)parcourir une grande partie du XXe siècle religieux - surtout français, mais pas seulement - notamment parce que Folliet fut sans cesse un observateur de son époque et tout autant homme de contacts: combien de personnalités de premier plan n'a-t-il pas rencontrées? En d'autres termes, par F. interposé, le lecteur se fait lui-même observateur de cette époque. Une bonne manière, parmi plusieurs, de se rendre compte que tout chrétien peut et doit être attentif à son époque. - B. Joassart, S.J.

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