Bien qu’imposant et érudit, ce gros ouvrage n’est pas celui d’un universitaire, mais d’un passionné et d’un pasteur. Passionné, parce que Pierre Burgat, pasteur pendant quarante ans, s’est converti à 67 ans à l’orthodoxie et a fondé l’association Saint-Silouane. Croisant cette double influence, son livre nous partage son enthousiasme pour les saintes Écritures et les Pères de l’Église, surtout orientaux. Pasteur, parce que l’ouvrage, avant tout pratique, se présente comme un exposé des huit « pensées » (logismoi) d’Évagre le Pontique, Père du désert de la troisième génération, qui, le premier, a systématisé non seulement ce qui deviendra, non sans déformation, nos sept péchés capitaux, mais, ce qui est malheureusement oublié, leur ordre. Chaque chapitre offre un double volet : diagnostique, fondé sur la relecture détaillée de Gn 3 et présentant un tableau « clinique » précis des différents symptômes ; thérapeutique (il parle de « guérison »), plus long, multipliant les remèdes, eux aussi largement illuminés par l’Ancien et le Nouveau Testament, et à l’école du Christ. Les huit chapitres sont longuement introduits par quelques bases anthropologiques, couronnés par un chapitre sur l’amour comme vertu et clos par une généreuse conclusion sur les fondements trinitaires et christologiques de cette éthique.

Le lecteur regrettera que les très nombreuses, généreuses et souvent judicieuses citations ne soient pas référencées. S’il est plus familier des écrits spirituels de l’orthodoxie, il s’étonnera moins que ces développements sur ces réalités « mixtes » que sont les « pensées » ne fassent jamais allusion aux acquis des sciences humaines qui les ont à la fois confirmées et affinées. Assurément, enfin, le propos n’est pas original. Jean-Claude Larchet avait précédé notre A. dans ses livres – notamment sa somme, Thérapeutique des maladies spirituelles (1997) – qui, eux, bénéficient des références souhaitées. Mais comment ne pas se réjouir de ce que cet écrit pastoral propose tant de moyens concrets pour mieux se connaître et surtout se convertir à la lumière de la Parole qu’est la Personne du Christ ? — P. Ide