Écrit juste avant le début de la pandémie causée par la Covid-19, cet ouvrage est d’une brûlante actualité. Constatant l’absentéisme croissant dans les assemblées liturgiques qui n’attirent plus, Manuel Belli, prêtre de Bergame et enseignant en théologie sacramentelle, en voit la cause dans la tristesse des rites (chap. 1).

Pour résoudre cette question anthropologique, qui est posée ici pour un pays, l’Italie, où le passage aux nouveaux rites sacramentels s’est fait sans tensions à première vue, mais pas sans conséquences pour la vie pastorale, il commence par interroger le rapport de l’homme contemporain à la nourriture et ose demander si on ne vit pas « une anorexie ou une boulimie eucharistique » (chap. 2), en proposant de mieux préparer notre habilitation et notre disposition à recevoir la nourriture eucharistique (p. 38). Il s’interroge ensuite sur la crise du dimanche (chap. 3), puis sur la bataille (perdue) d’Halloween (chap. 4), et la perception de la liturgie comme une satisfaction de soi (« la multiplication des couronnes de laurier », chap. 5), alors que la liturgie n’est pas une expérience du monde (cf. Lacoste) mais un ensemble de symboles (Chauvet).

Vient alors une étude sur la piètre qualité de la musique liturgique (chap. 6) et quelques remèdes : prendre conscience du répertoire à notre disposition ; chanter : comment chante-t-on dans notre église ? ; écouter : la musique est pour tous ; composer, c’est-à-dire travailler la formation musicale dans nos communautés (p. 104-105).

Arrive un débat sur la crèche et la passion, lieux de la religiosité populaire en Italie, qui devrait nous faire quitter nos liturgies trop conceptuelles (chap. 7). D’autres questions qui fâchent : quelle place donnons-nous aux jeunes dans l’église (chap. 8. On se rappellera le titre du livre : quel jeune voudra une liturgie « triste » ?) ; pourquoi s’ennuie-t-on à la messe ? (chap. 9). L’A. interroge aussi les « nouveaux rites de voyage » avec la facilité de prendre l’avion aujourd’hui, où se manifeste une symbolique du mouvement qu’on retrouve dans la procession liturgique (chap. 10). La révolution informatique (chap. 11) ouvre à la réflexion sur la « nudité de la parole ». L’époque de Tinder (application de rencontres amoureuses) provoque aussi à revoir la liturgie comme mystère d’alliance (chap. 12).

Enfin, et comme une surprise après tous ces constats pessimistes, l’A. propose quelques « notes provisoires pour des rituels heureux » (chap. 13). L’homme est un être rituel. Il faut le prendre comme il est. Il faut aller jusqu’à une « catéchèse expériencelle » qui dépasse la doctrine et n’oublie cependant pas le kérygme (chap. 14). Le dernier mot est donné à Guardini, pour que les rites expriment l’intériorité pour la vivifier. On pourra interroger l’A. sur la place que prend la relation au Christ dans la liturgie qu’il souhaite instaurer : la notion de corps du Christ pourrait sans doute être plus développée. Un ouvrage stimulant, donc, qui ose remettre en cause bien des traditions établies dans nos fonctionnements liturgiques, ou du moins des habitudes formalistes dont il convient de se débarrasser au plus vite pour retrouver le sens du rite : non pas triste mais joyeux de la rencontre avec le Dieu vivant. — A. Ms.

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