Cet opuscule publié en 1945, et deux fois réédité, porte sur un
thème ignoré et souvent méprisé comme obsolète de la doctrine
économique de saint Thomas : la destination des richesses. Mais
l'A., prêtre tchécoslovaque (1910-1975), qui eut à souffrir des
régimes nazi et communiste, avant de finalement s'expatrier
clandestinement en Italie en 1962, pense qu'il est d'une grande
actualité. La crise économique, affirme-t-il, ne vient pas du
manque de biens, mais de son injuste répartition. En effet, pour
réaliser le bonum virtutis, tout homme a besoin d'une
certaine quantité de biens matériels, de sorte qu'en manquer, être
pauvre, est un malum simpliciter. La richesse a donc
pour destination de répondre aux nécessités de la vie et de la
position sociale. Ce qui est en excédent correspond alors
au superfluum (chap. 1). Au nom du droit à
la propriété privée, l'homme peut acquérir du superflu
(chap. 2). Mais puisque, par définition, il n'en a pas besoin,
il doit le mettre au service du bien commun en le
cédant en totalité aux pauvres (chap. 3).
Pour Thomas, la modalité de donation aux pauvres est l'aumône
(chap. 5), mais il n'est pas interdit d'actualiser ces
modalités (chap. 4).
Cette thèse, démontrée pas à pas, avec pédagogie et conviction,
fait l'effet d'un coup de tonnerre dans le ciel pas si serein que
cela de l'économie dérégulée qui est la nôtre. La doctrine sociale
de l'Église affirme de même que l'argent ne doit pas « dormir »,
mais reconnaît plus largement que son usage peut se faire non
seulement sous forme de don, mais aussi d'investissement (toujours
risqué). Toutefois, cet opuscule invite à un examen de conscience
et à un discernement bienvenus. - P. Ide