Il ne s'agit pas de résoudre la «question franciscaine». L'A. nous
présente son livre comme la «vision d'un moment». Mais on se
réjouira d'y découvrir des réflexions stimulantes sur les sources
essentielles de notre connaissance de saint François et sur la
perspective dans laquelle les aborder. C'est un appel à scruter le
visage du saint d'Assise «en empathie», à travers les brumes des
légendes et le temps écoulé. On sait quel est le problème central
que, depuis Paul Sabatier jusqu'à la plus récente historiographie,
il faut s'efforcer d'examiner. François, et son image, sont-ils
d'abord des objets de manipulation, ou faut-il voir en lui un
acteur à part entière? Jacques Le Goff avait fait remarquer que,
même s'il était l'héritier de traditions multiples, et que, même si
après lui son image avait été déformée par le travail de la
mémoire, François avait assumé, à n'en pas douter de manière
originale, les principales mutations de son époque. Remaniements et
manipulations n'empêchent pas que le saint d'Assise ait été
effectivement un homme exceptionnel. Il faut désormais briser le
cercle de la question franciscaine. Il faut examiner la possibilité
et les conditions de l'usage historique des légendes en ouvrant la
recherche à tout le domaine qui déborde les seules sources latines.
À la suite de G. Miccoli il faudra continuer à en chercher les
stratifications, mais sans abandonner pour autant l'espoir de
remonter vers le François historique. Il faudra toujours reconduire
François à sa «malaventure», avec la certitude qu'il n'y est pas
exclusivement contenu. Saint Bonaventure n'a pu transfigurer son
héros à partir de rien: il y avait, assurément, dans la poule noire
de quoi faire un séraphin. - H. Jacobs, S.J.