La porte du ciel. Les esséniens et Qumrân. Quelles origines ? Quelles postérités ?, préf. J.-S. Rey

Étienne Nodet op
History - reviewer : Gauthier Kirsch

Pour Étienne Nodet, spécialiste dominicain du judaïsme des premiers siècles avant notre ère, la question de Qumrân est à reprendre à nouveaux frais. Innombrables sont les interprétations de ce site archéologique et des trouvailles qui y furent faites, mais l'A. reprend la question en partant d'un passage biblique particulier, qui est pour lui la clef de tout : le chap. 5 du livre de Josué.
Ce récit du passage du Jourdain et de la circoncision comme témoin de l'Alliance à Gilgal, l'entrée effective en Terre promise, est pour le dominicain le thème marquant du renouveau spirituel que représentait au ier s. av. J.-C. le mouvement des Esséniens. Ces derniers sont bien reliés au site de Qumrân (d'autres en doutent), mais comme des occupants de la « dernière heure » : en effet, pour É. Nodet, Qumrân est d'abord un lieu de pèlerinage, utilisé pendant une longue période pour commémorer cette alliance à Gilgal.
Se basant sur une analyse à la fois archéologique et historique très fouillée, l'A. met dans le contexte, depuis la période du retour d'exil, les courants qui ont animé le judaïsme palestinien. C'est une période - depuis les livres bibliques d'Esdras et de Néhémie jusqu'à Flavius Josèphe - pour laquelle les sources présentent beaucoup de problèmes d'interprétation. É. Nodet s'y aventure et propose son hypothèse.
Ainsi, les Esséniens sont conçus comme un courant issu des Thérapeutes égyptiens de Philon, un renouveau biblique basé sur les textes du Pentateuque/Hexateuque, avec un calendrier particulier. Ils se distinguent du courant spirituel des juifs revenus de l'exil à Babylone, qui engendreront les Pharisiens. Ce sont des agriculteurs vivant en marge des grandes villes, au contraire des Sadducéens - avec lesquels ils ont pourtant des affinités. Leur rite principal, symbole de l'alliance, c'est le baptême. Ils réinvestissent le site de pèlerinage de Qumrân (en lui-même impropre à l'agriculture) et s'y font même un cimetière, pour être enfouis au sein de la Terre promise au lieu même où les hébreux y entrèrent pour la première fois.
L'auteur analyse ensuite les multiples influences de cette spiritualité sur le christianisme et le rabbinisme. C'est une enquête passionnante, au-delà de son impressionnante érudition : elle suscitera sans nul doute de fécondes controverses. - G. Kirsch

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