Dans La vraie religion, Joaquín Silva Soler se propose de
dialoguer avec Bernhard Welte (1901-1993). Ce théologien et
philosophe catholique allemand part de la philosophie de Jaspers et
de ses contemporains et s'efforce, en réponse à leur démarche,
d'interpréter de façon nouvelle l'apport thomiste sur Dieu. Suivant
pas à pas Welte, Silva réfléchit avec lui sur le concept de
religion et les divers sens donnés à ce terme. Puis il montre que
la foi est à la recherche de son intelligibilité et il examine les
résultats de cette démarche au cours des siècles, du XIVe au XXe
siècle, spécialement à partir de la Réforme. Il s'interroge ensuite
sur l'expérience de la proximité de Dieu et la découvre dans le
fait, pour l'homme, de se percevoir comme être dans le monde et d'y
aspirer à la liberté, dans l'expérience du néant, dans la question
de son origine et du fondement de celle-ci, dans l'expérience aussi
de la faute individuelle et sociale, dans l'interrogation sur le
sens et sur le postulat de l'existence d'un sens. Il montre enfin
que l'expérience de Dieu est une expérience de grâce. Un troisième
chapitre est consacré au Dieu de la vraie religion. Il expose que
celui-ci ne peut être pensé sur le modèle de la science (Kant),
qu'il faut nécessairement dépasser la métaphysique (au sens
restreint que lui donne Heidegger), ce qui impose de revenir à la
position de saint Thomas et de constater qu'elle ouvre la porte à
un dépassement. Ayant présenté Maître Eckhart, il décrit la voie de
l'analogie et découvre en Dieu le mystère absolu qui ne peut être
connu que par révélation, processus dialogal dans lequel celui-ci
se fait saisir comme ineffable et personnel. Ceci lui permet, dans
la conclusion, de montrer que de nombreuses formes de religion sont
inauthentiques pour diverses raisons qu'il décrit: la vraie
religion amène à l'expérience de l'amour inconditionné de Dieu.
Claires, intéressantes et bien informées, ces pages ouvrent des
perspectives éclairantes pour une approche du dialogue
interreligieux basée sur le fait que Dieu se révèle à tout homme de
bonne volonté et justifie le respect avec lequel, dans ces
échanges, il convient d'accueillir ces traces de Dieu, même si
elles y sont mêlées à nombre d'impuretés. - L. Renwart, S.J.