Si les célèbres danses des «derviches tourneurs» ont intrigué les
voyageurs d'autrefois et attirent les touristes d'aujourd'hui, il
n'existe guère de publications accessibles situant cette pratique
dans son contexte historique, social et spirituel. S'adressant «au
grand public intéressé», le présent ouvrage, «sans être
excessivement académique, pourra aussi être utile aux
spécialistes». Une première section (È. Feuillebois) fait revivre,
dans le double cadre de la tradition soufie et de la littérature
persane, la figure de 'Mawlânâ' ou 'Mevlânâ' Rûmî (1207-1273): sa
vie et sa légende, ses oeuvres, sa théologie spirituelle et son
cheminement mystique, son art poétique. Suit une présentation (Th.
Zarcone) de la confrérie dont Rûmî est l'inspirateur plus que le
fondateur direct et qui se développa pour l'essentiel dans l'aire
turque, jusqu'à sa dissolution officielle en 1925: histoire
institutionnelle et politique, patrimoine littéraire et artistique,
enfin pratiques initiatiques et spirituelles, que ce soit dans le
cadre semi-monastique et célibataire du couvent ou dans la vie
laïque et mariée en ville. Vient enfin (A.F. Ambrosio) une étude
détaillée de la danse - ou du concert spirituel (samâ': litt.
'écoute', 'audition') - telle qu'elle a été reprise, élaborée et
progressivement codifiée dans cette école: l'analyse du
développement chorégraphique est complétée par l'examen d'une
symbolique complexe qui se déploie dans plusieurs registres tant
individuels que cosmiques: amour, séparation, aspiration à
retrouver l'origine, mort spirituelle, voyage à travers les
sphères…
Tout en demeurant très lisible, l'ouvrage est pourvu de notes
abondantes et précises, d'une importante bibliographie, d'index des
noms et des thèmes; il est agrémenté de schémas (pour le
déroulement de la danse) et d'un cahier de photos et reproductions
hors-texte. - J. Scheuer sj