La mondialisation fait peur, rappelle Jérôme Vignon, Président des ACM, dans son introduction. Quel regard les chrétiens portent-ils sur cette réalité? De quelle réalité s'agit-il? Surtout, quel message d'espérance peuvent-ils communiquer en se référant à leur foi et quelles actions concrètes prendront-ils pour réagir à cette peur et pour faire face aux menaces que porte le déploiement actuel de la mondialisation? Le LB n'est pas l'expression d'une parole unique, mais celle d'une expérience de dialogue, d'écoute et de compréhension d'autrui. C'est là que se trouve son essence. Il est une tentative actuelle d'«être Église», c'est-à-dire d'être présent dans le monde en tant que chrétiens. «Ne pas se dire humanistes quoique chrétiens, mais humanistes parce que chrétiens, de façon novatrice, au nom de la Bonne Nouvelle», comme le dit Mgr Gérard Defois en clôture des ACM.
La mondialisation n'est pas un phénomène nouveau. Elle est toutefois, aujourd'hui, entrée dans une nouvelle phase de développement de son histoire. Une phase caractérisée par une rapidité extrême, par l'insécurité qu'elle génère, par sa complexité et par les principes libéraux qui, depuis l'effondrement du communisme, ont désormais le champ libre. Elle est technique, environnementale, politique, économique et culturelle. L'humanité tout entière se constitue désormais un destin. Les progrès de l'humanisation de la mondialisation ne viendront pas du haut; ils se construiront pas à pas, par en bas, c'est-à-dire par la contagion d'initiatives partielles et volontaires. Ce sont précisément ces initiatives individuelles qui pourront servir de modèle à la loi, tant nationale qu'internationale.
Le LB propose ce cheminement sur quatre axes: celui d'un développement humain (solidarité entre les peuples) et durable (solidarité entre les générations), celui des mouvements migratoires (la mondialisation rend les migrations possibles et elle accule à y recourir) et de la culture, celui des conditions sociales, humaines, écologiques et économiques de la création de richesses (avec une référence particulière aux principes de l'enseignement social des Églises, dont ceux de la proportionnalité, de la subsidiarité et de la destination universelle des biens), et enfin celui de la gouvernance mondiale et de la construction de la paix.
L'initiative du Livre Blanc est française, certes; heureusement, elle ouvre largement la porte aux valeurs ajoutées de la construction européenne pour orienter de façon constructive les évolutions de la mondialisation. La forme de l'ouvrage n'en rend pas la lecture nécessairement aisée. Il risque aussi, en l'état, d'apparaître à certains endroits comme un catalogue de bonnes mesures à initier, sans nécessairement fixer des critères de priorisation suffisants. - A. Schramme