Il est bien des manières d'être théologien. Après s'y être formé, au sens le plus classique, dans «l'usine intellectuelle inimaginable du Saulchoir», Jean-Pierre Jossua a peu à peu découvert la sienne: celle «d'écrire de façon plus vraie, plus nue, si possible plus belle que naguère, en les creusant davantage, quelques fragments de vie et de pensée - choix, espoirs, chances, intuitions, découvertes, échecs - sans l'illusion de la globalité ni l'artifice de la chronologie, afin de découvrir s'il m'est encore possible d'avancer à soixante-dix ans». Le choix d'abandonner un enseignement universitaire régulier pour se consacrer à (ce) travail d'écriture se cristallisa, vers 1980, dans la rédaction de ses premiers Journaux théologiques, puis en une étude théologique de la littérature. Dès l'âge de vingt ans, J.-P. J. avait également rencontré l'univers de la peinture et celui de la musique devenue depuis, «une composante de (sa) vie quotidienne, écoutée chaque soir pendant deux ou trois heures» (avec, sans doute, la fraternelle complicité des voisins de cellule?…). Parcours spirituel non moins original: issu d'une famille israélite de nationalité française, mais originaire de Salonique, dont les descendants avaient cessé d'être religieux depuis deux générations, il avait été baptisé dans l'Église catholique en 1952. Devenu dominicain, après des études de médecine, il vécut avec passion, comme la plupart des jeunes religieux de cette époque (nous en étions), l'événement inespéré du Concile, dont il connut personnellement plusieurs des maîtres d'oeuvre, dont Yves Congar qui devint pour lui un maître et un ami très proche. C'est de tout ce vécu intense, complexe et foisonnant qu'il «fait mémoire» en ce volume d'une centaine de pages, rédigées selon les méandres d'une réflexion à la fois modeste et exigeante, non conformiste à l'occasion, et pourtant solidement ancrée dans ce qui est pour lui «l'expression, le point de jaillissement et l'école permanente d'une juste orientation de la foi et de l'existence chrétienne»: l'eucharistie, où «se trouve représenté, éprouvé, créé ce qu'est la foi, ce qu'elle est appelée à être… Il faudrait ajouter la relation à 162 BIBLIOGRAPHIE autrui, l'appartenance à l'Église, l'espérance ultime… Cette création des trois premiers siècles chrétiens… sur le fondement d'un simple geste et de quelques paroles de Jésus, dit entièrement ce que je crois, ce que j'aime, ce que je veux espérer et pratiquer» (p. 13). Il nous fallait citer en propres termes cette paisible profession de foi - écho d'une formule patristique traditionnelle: Lex orandi, lex credendi- afin de relativiser l'étonnement que pourraient susciter au passage, à tort ou à raison, certaines opinions de l'A., notamment en ce qui concerne l'«inspiration biblique» (p. 16), ou la «contradiction anthropologique» que comporterait, selon l'A., «le célibat définitivement fixé, voué et valorisé» (p. 28). Il est vrai que, sur ce dernier point, il interprète lui-même son propos en écrivant: «Je pose une question». Ce n'est d'ailleurs pas un des aspects les moins attachants de cette «anamnèse» que de respecter la liberté de ses lecteurs. - P. Lebeau, S.J.

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