Le défenseur du lien dans les causes de nullité de mariage

Philippe Hallein
Moral y derecho - reviewer : Benoît Malvaux
Ce volumineux ouvrage est la reprise d'une thèse en droit canonique défendue par l'A., prêtre du diocèse de Bruges, à l'Université Grégorienne. Dans une première partie de sa thèse, l'A. retrace l'historique de la fonction de défenseur du lien. L'origine de cet office remonte à la constitution apostolique Dei miseratione du pape Benoît XIV en 1741. Il s'agissait de réagir à des abus de la justice ecclésiastique de l'époque, susceptibles de mettre à mal la sacramentalité et l'indissolubilité du mariage. Pour éviter le danger de collusion des parties, au détriment de la vérité canonique, il incombait au défenseur du lien de déduire tout ce qu'il jugeait nécessaire pour soutenir la validité du mariage. Le code de 1983 ouvrit cet office aux laïcs, renouant avec la pratique originelle, abandonnée en 1883. Selon le canon 432, le rôle du défenseur du lien est de présenter et d'exposer tout ce qui peut être raisonnablement avancé contre la nullité ou la dissolution du mariage. Comme le disait Pie XII, le défenseur du lien est au service de la vérité. Il ne s'agit donc pas pour lui de multiplier des observations artificielles, dans le seul but de prolonger le procès. Mais il ne peut pas non plus avancer des arguments en faveur de la nullité du mariage.Notons encore que l'interprétation de la figure du défenseur du lien continue à faire débat aujourd'hui, entre ceux qui le considèrent comme un collaborateur du juge et ceux qui le voient comme partie sui generis au procès, voire comme le représentant de la partie opposée à la nullité du mariage. La deuxième partie de l'ouvrage se penche sur la nature de l'instruction Dignitas connubii promulguée en 2005 par le Conseil Pontifical pour l'Interprétation des Textes Législatifs. Cette instruction se présente comme un manuel destiné à présenter une explication complète du procès matrimonial. Mais s'agit-il vraiment d'une instruction ou d'un décret général exécutoire? Dans la première hypothèse, Dignitas connubii ne pourrait pas introduire de véritable innovation dans le droit; elle devrait se borner à expliquer les dispositions des lois, à destination particulièrement de ceux à qui il appartient de veiller à leur exécution. Dans le second cas, il s'agirait d'une disposition à caractère général, émise par une autorité exécutive, qui s'adresse à tous ceux qui sont soumis aux lois, avec un effet contraignant. Si le décret général a plutôt un caractère public, l'instruction a plutôt un caractère interne. Pour l'A., Dignitas connubii est certainement une instruction atypique, qui a quasiment toutes les caractéristiques d'un décret exécutoire général. La troisième partie de l'ouvrage est une étude synoptique fouillée du code de 1983 et de l'instruction Dignitas connubii, à propos de l'office et des pouvoirs du défenseur du lien. L'A. examine d'abord l'office du défenseur du lien dans la pars statica, l'organisation des tribunaux. L'instruction renforce la collaboration active du défenseur du lien dans le procès. Il ne doit pas intervenir seulement au moment de remettre ses observations, mais dès le début du procès. Dans les causes d'incapacité visées par le can. 1095, il intervient notamment à propos des questions posées aux experts et du rapport rendu par ces derniers. Ces dispositions constituent de réelles nouveautés, qui avaient cependant déjà été avancées par Jean-Paul II dans une allocution à la Rote romaine. L'A. examine ensuite les pouvoirs du défenseur du lien dans le procès matrimonial, la pars dynamica. Une nouveauté importante est le fait qu'il est opportun que le défenseur du lien donne son opinion quant à l'admission ou au refus du libelle. Il apparaît ici clairement plus comme un aide du juge que comme une partie au procès. Inévitablement, l'ouvrage a la technicité d'une thèse. Il met fort bien en évidence les différents traits caractéristiques de la figure du défenseur du lien, évoquant incidemment les débats qui ont pu naître à son propos. On regrettera cependant que la qualité de l'expression française laisse souvent à désirer. - B. Malvaux sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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