L'Apocalypse johannique est susceptible de lectures variées; l'histoire de l'interprétation depuis deux siècles le démontre aisément. Après les approches récentes, structurale, sémiotique, rhétorique ou narrative, l'A., qui a déjà publié plusieurs essais sur le dernier écrit biblique, tente ici une analyse d'un nouveau type, qui prend en compte l'«esthétique théologique» telle que sa composition liturgique nous la révèle. C'est là une initiative pleine d'intérêt.
Comment l'A. procède-t-il? Après une introduction où il passe en revue les grands commentaires et études du XXe siècle, il mentionne quelques rares approches esthétiques, dont celle de J. Frey Die Bildersprache der Johannesapokalypse (ZKT, 2001). Il construit alors son analyse en huit étapes. Une 1re est consacrée à la «réception artistique» du livre en rapport avec l'expérience esthétique, une 2me aux fonctions de la vue et de l'ouïe dans l'imaginaire johannique, un 3me chapitre à l'«image» comme forme de l'écrit, et un 4me au processus de stylisation et de ses mécanismes spécifiques. Ces préalables une fois assurés, un 5me chapitre développe brillamment «l'esthétique de la fiction» dans l'Apocalypse: fonction du symbole, langage mytho-poétique, temps et espace du récit, avec leurs dimensions dramatiques: le chap. 6 fait l'objet de la réalité dramatique du livre, avec ses modes propres d'expression et de représentation, aboutissant à ce qu'il appelle «une esthétique de proximité» qui parle aux sens conjugués du lecteur. Une sorte de confirmation de sa thèse est amenée au chap. 7 qui analyse avec clarté et précision le début de l'écrit (Ap 1,1-20) comparé à la salutation finale (Ap 22,21). Enfin, un 8me chapitre nous offre une conclusion intelligente et fort suggestive: quels rapports peut-on instituer entre la théologie et l'esthétique du livre. Il y reprend les discussions concernant l'incorporation du livre dans le canon scripturaire, puis s'interroge à propos de la forme éminemment esthétique de la révélation johannique dans ce qu'il appelle la «médiation symbolique». La dernière partie du chapitre touche le rapport entre histoire et eschatologie, en insistant sur le contexte esthético-liturgique de l'Apocalypse de Jean.
Cet ouvrage, qui par quelque côté rejoint «l'esthétique théologique» de H. Urs von Balthasar, et qui rappelle quelques fines notations de Paul Claudel dans Au milieu des vitraux de l'Apocalypse, réjouira les exégètes attentifs à l'ordonnance et aux éléments poétiques des textes johanniques. Une veine qu'on n'a pas fini de creuser: celle de l'imaginaire et de la symbolique subtile d'une liturgie prophétique telle qu'elle se joue dans le dernier livre de la Bible. - J. Radermakers sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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