Quiconque s'intéresse à la crise moderniste, surtout en France, rencontre inévitablement le héros de ce livre. Poitevin d'origine, il entra dans la Compagnie de Jésus en 1869. Et comme beaucoup de ses confrères, il fut engagé dans l'apostolat des collèges et sera même recteur du collège de Poitiers de 1895 à 1901. Il s'y dévoua corps et âme, avec une énergie peu commune, se montrant toutefois à ses heures d'une rigidité qui étonnait même pour l'époque, ainsi qu'en témoignent les souvenirs de M. Brillaud, l'un de ses anciens élèves et aussi l'un de ses admirateurs, souvenirs placés en tête de l'ouvrage - Y. Ch. prenant le relai pour donner une biographie d'un peu plus de 85 p. À la suite de la loi de 1901, puis quittant la Compagnie en 1905, Barbier se lança dans une carrière de publiciste, au cours de laquelle il put donner libre cours à ses principes totalement opposés à toute forme de «ralliement» et surtout de «modernité»: libéralisme et démocratie - entre autres dans la manière dont Marc Sangnier et le Sillon l'envisageaient - étaient absolument inadmissibles pour lui. Il suffit pour s'en convaincre de lire sa volumineuse Histoire du catholicisme libéral et du catholicisme social en France (5 tomes plus un de tables, parus en 1923-1924), et plus encore de fréquenter sa revue, La critique du libéralisme, religieux, politique, social, qui paraîtra entre 1908 et 1914 et sera une officine intégriste de belle allure. La bibliographie de ses écrits donnée en fin de volume ne fait que confirmer les orientations fondamentales de Barbier.
Cela étant, il est important de souligner toute la sympathie que l'A. éprouve à l'égard de son sujet. C'est certes de bonne méthode dans un ouvrage qui se veut historique. Il a également l'honnêteté de signaler que Barbier et ses collaborateurs usaient souvent de pseudonymes pour dénoncer tous ceux qu'ils estimaient «modernistes». Il a toutefois oublié un élément important: c'est que précisément ce paravent des pseudonymes n'était guère - pour ne pas dire plus - honnête! Que de gens ont été attaqués par La critique du libéralisme sans savoir de qui venaient exactement les coups, d'ailleurs souvent approuvés par les plus hautes autorités ecclésiastiques… En d'autres termes: que Barbier et ses partisans aient eu les idées qui étaient les leurs et qu'ils les aient exprimées publiquement, est une chose. Qu'ils se soient transformés en «délateurs masqués», sorte de «Zorros en soutane», en est une autre, inadmissible quand on prétend défendre la vérité. J'ai eu moi-même l'occasion de voir Barbier à l'oeuvre dans sa dénonciation des Légendes hagiographiques du bollandiste Delehaye (cf. Hippolyte Delehaye. Hagiographie critique et modernisme, Bruxelles, 2000). On ne peut que reprendre l'appréciation émise dans un numéro de 1912 de la Semaine religieuse de Toulouse à propos de la revue de Barbier: «Il y a de tout, en effet, dans ses procédés: de la puérilité, de la méchanceté, du mensonge aussi et souvent, hélas! de la calomnie». Il suffit. - B. Joassart sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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