La réconciliation corporelle. Une éthique du droit médical

Xavier Dijon s.j.
Moral y derecho - reviewer : C. Casalone
La notion de liberté est un des noeuds centraux dans la discussion des problèmes actuels de nos sociétés pluralistes occidentales. Le volume de X. Dijon commence en examinant, avec précision et efficacité, la notion libérale de la liberté. Une notion fort répandue, bien que le plus souvent de manière implicite.
L'A. mène son analyse de la perspective libérale en faisant émerger de l'intérieur de celle-ci quelques contradictions. Parmi ces dernières, la plus significative consiste dans le fait de penser la liberté à partir d'un état de nature abstrait délié des liens avec le monde des choses, des personnes et des institutions sociales, oubliant ainsi les conditions qui en rendent possible la naissance (p. 19.24) et l'exercice (p. 28). On se prive ainsi des références pour penser adéquatement la liberté. Seul l'individu semble constituer un critère valide. Mais à peine s'interroge-t-on sur la réalité de ce qu'est réellement cet individu et sur sa vie en société, et la contradiction se manifeste: la lecture libérale des droits de l'homme est un exemple d'une telle aporie, encore plus évidente dans le développement de la deuxième et de la troisième génération de ces droits.
Le droit comme la médecine se ressentent de manière symétrique d'une telle absence de références. D'une part, le droit court le risque de devenir une parole sans corps: la compréhension du contrat social comme convention, fondée sur la volonté des citoyens et au coeur de laquelle disparaît toute référence à la présence de l'autre, dans sa concrétude corporelle. La médecine, d'autre part, court le danger de devenir un corps sans parole. Elle opère légitimement une réduction du corps humain à l'organisme. Mais le problème surgit quand une telle réduction s'avère irréversible. Le manque d'une parole profonde échangée à propos des événements fondamentaux de la vie dans lesquels le corps est concerné - la procréation ou la non-conception d'un enfant, l'handicap, la maladie ou la mort - mène à ne pas reconnaître l'autre comme une personne.
Le but fondamental de l'éthique consiste alors à réconcilier «la contingence des corps d'une part, l'importance de la parole de reconnaissance d'autre part, dans une prise de conscience renouvelée de l'intériorité personnelle vécue dans le corps» (p. 8). Tel est le critère proposé par l'A. Il en montre la pertinence pour quelques thématiques brûlantes dans le débat bioéthique actuel. Il s'agit, de plus, d'un critère qui trouve sa confirmation et son approfondissement dans la tradition de la foi judéo-chrétienne même si, dans ce volume, les indications théologiques ont plus une tonalité suggestive qu'un accent de développements systématiques. - C. Casalone, S.J. Trad. A. Mattheeuws, S.J.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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