Lyonnais, de famille assez pauvre, Ant. Chevrier (1826-1879)
devient prêtre diocésain en 1850 et vicaire d'une paroisse
populaire à Lyon. À la Noël 1856, en méditant sur l'Incarnation, il
reçoit une grâce de «conversion » et comprend que, comme Jésus, il
doit sauver les pécheurs par la pauvreté. Il se dresse un programme
de vie pauvre semblable à celle de Jésus à la crèche, à la croix et
dans l'Eucharistie. En 1860, il loue une salle de bal, le Prado,
pour former des enfants pauvres à un métier en 5 ou 6 mois, et leur
apprendre catéchisme, lecture, écriture et calcul. Devant
l'incompréhension de ses confrères et pour assurer l'avenir de son
oeuvre, il fonde une «école cléricale » qui lui fournira des
prêtres adaptés aux pauvres et une congrégation féminine pour aider
les filles. Quant aux finances, il compte sur la Providence. On
peut dire qu'il fut l'un des premiers apôtres du monde ouvrier de
la grande industrie. Il a écrit un livre, le véritable disciple,
donnant l'essentiel de son esprit, et il a laissé 20.000 pages de
notes sur l'Écriture et principalement l'Évangile. On les a
classées en 13 matières. Il prend la Bible au pied de la lettre,
sans esprit critique, comme une histoire révélée. Son étude de
Jésus-Christ consiste à accumuler les textes par sujets pour les
laisser parler par eux-mêmes, avec très peu de commentaires. Il
croit que la Parole de Dieu écrite prolonge l'Incarnation. «Le
prêtre doit disparaître devant Jésus-Christ». Chevrier a été
fasciné par la beauté et la grandeur du Christ. Prêtre du Prado et
directeur de son Centre spirituel, Y. Musset s'est attelé à l'étude
des écrits et des lettres de Chevrier, ainsi qu'aux dépositions des
témoins au procès de béatification. Il reconnaît que la pensée du
fondateur est très proche de celles du Père Neveu (†1708): étudier
le Christ pour l'imiter et se laisser former par l'Évangile qui a
formé les apôtres. Mais cet amour admirable n'a pas empêché A.
Chevrier de rester fermé à la modernité (politique, économie,
culture) en interdisant même à ses premiers disciples de lire les
journaux, dont il s'était fort bien passé. Chevrier a été béatifié
en 1986. - B. Clarot,