Auteur de nombreux ouvrages et habitué aux questions-réponses à
propos de thèmes délicats dans la revue Famille
Chrétienne, le P. A. Bandelier nous offre un livre d'une forte
cohérence sur le mariage chrétien et sa blessure actuelle qu'est le
divorce. Prenant acte des nombreuses difficultés contemporaines qui
touchent particulièrement les baptisés, il déploie d'abord cette
force qu'est l'amour dans l'histoire humaine et sa mise en évidence
dans l'enseignement du Christ lui-même (Partie 1). Ce fondement
christologique est décisif pour comprendre l'action même de
l'Église et pour affronter les débats ultérieurs. L'enseignement de
l'Église est toujours inscrit dans les évolutions sociopolitiques
et religieuses, mais il n'est ni arbitraire ni purement
disciplinaire: il participe de la fidélité même de Dieu à l'homme
dans son oeuvre de salut. «L'épreuve du divorce», c'est l'horizon
d'une relation qui se veut «durable» au commencement et qui mesure
sa fragilité et ses échecs pour elle et pour les autres. En un
sens, par des formules précises, rudes parfois, l'A. nous plonge
dans le réalisme de la naissance, de la construction, de la
maintenance de la vie de couple. Les problèmes ne sont pas
seulement psychologiques, mais appartiennent au combat spirituel:
il y a des choix à faire (Partie 2). Les décisions de «se séparer»
ou/et de «se remarier» ne se prennent jamais à la légère! Elles
engagent profondément les libertés des époux et des membres de la
communauté ecclésiale. Les enjeux et leurs conséquences sont ainsi
clairement mis en évidence.Les deux parties suivantes sont encore
plus intéressantes car elles livrent la réflexion précise et
pastorale de l'A. qui s'engage et parle avec audace de situations
concrètes. Il y a des chemins qui sont des «impasses»: fausse
fidélité (fidélité vengeresse, procès jamais fini, tristesse) ou
fausse nouveauté (oublier le passé, fin de l'amour et du mariage,
droit au bonheur). Il y a des impasses qui deviennent un «chemin»:
solitude et/ou compagnonnage dans l'espérance. Ce qui est décrit
est bien une «Église des pauvres», traversée par une souffrance qui
cherche sa signification en Christ, une humble souffrance issue de
multiples humiliations! Il s'agit bien d'un chemin d'imperfection
lié à une vraie sanctification des personnes: un itinéraire
eucharistique. Les questions posées en finale concernent le
remariage des catholiques. Faut-il garder le silence, entretenir la
confusion, cultiver le dissentiment? Quelle bénédiction accorder?
Quelle communion eucharistique convient-il de vivre: de fait, de
désir, en esprit? Quelle réconciliation recevoir dans le corps
ecclésial et à travers le sacrement? Comment et pourquoi suivre sa
conscience? N'est-il pas essentiel d'aimer? Comment ne pas
confondre vérité et sincérité? Conjuguer la miséricorde et la
vérité est l'intention profonde de ce pasteur qui partage souvent
son expérience. Rendons hommage au langage pastoral qui nous est
offert et nous provoque à réfléchir, à chercher également les mots
adéquats pour des réalités aussi complexes et douloureuses. Des
précisions pourraient encore être apportées (ne pas parler de
«premier» époux, [p. 183]; d'un mariage «initial», [p. 228];
surtout d'un conjoint «initial», [p. 217]). Ces passages témoignent
cependant d'un vrai souci de vérité. Ils intègrent la route ouverte
par les sessions de J. Nourrissat, de nombreux groupes d'accueil et
de cheminement avec des couples en situations délicates (Cana,
session «Miséricorde et Vérité»). L'accueil et la réflexion
théologique sont certainement nourris de l'existence et du
témoignage des membres de la Communion Notre-Dame d'Alliance dont
l'A. a été l'accompagnateur spirituel. Saluons la parution de ce
livre qui, à la suite de parutions antérieures, met en lumière les
enjeux d'une situation ecclésiale difficile et qui nourrit la
réflexion et l'espérance des fidèles, des pasteurs et des
théologiens. - A. Mattheeuws sj