Ensuite, il met cartes sur table en traitant longuement de l'historicité des évangiles de l'enfance, démasquant les «préjugés méthodologiques» et les «présupposés philosophiques» (p. 39s.) qui viennent brouiller une lecture croyante des textes. Mais de quelle «historicité» parle-t-il? N'y a-t-il pas une compréhension théologique de l'histoire - où Luc est passé maître -, qui s'exprime à travers des genres littéraires spécifiques? Après nous avoir inculqué son propos d'historicité, l'A. étudie successivement Lc 1-2 et Mt 1-2 sur le plan rédactionnel, conjointement avec une analyse sémiotique. Dommage qu'il n'ait pas poursuivi son travail par une analyse narrative, qui eût pu apporter quelque lumière dans le débat, mais la méthode n'était pas encore développée il y a vingt ans. Par ailleurs, l'A. ajoute un long chapitre sur les «généalogies» de Jésus et en propose une synopse. Il achève son oeuvre en tentant de ressaisir la convergence des deux évangiles du double point de vue historique et symbolique, avant de mettre en évidence «l'expérience inspiratrice» des évangélistes et d'expliquer leurs différences. La réflexion sur ce dernier point serait certes à poursuivre, à l'aide d'excellents travaux parus ces dernières décennies; une mise à jour de la bibliographie aurait été fort utile, tant sur le plan des méthodes d'interprétation que sur celui de la théologie.
Tel quel cependant, le travail demeure valable; il l'eût été davantage si l'A. avait pu se départir de sa pointe polémique; en voulant trop prouver, on déforce souvent son argumentation. L'essentiel est que ce livre continue de stimuler notre réflexion sur la réalité de l'incarnation du Fils de Dieu et sur le langage pour la formuler, car l'indicible s'exprime par le symbole. La naissance de l'homme-Dieu et son passage au Père sont de cet ordre. Aux lecteurs avertis, ce livre permettra de mieux goûter les évangiles de Noël et le mystère de la Nativité. - J. Radermakers, S.J.