On sait qu'un des théologiens les plus considérables du XXe siècle,
Karl Barth, estimait qu'il lui fallait consulter chaque jour la
Bible et le journal quotidien. Gabriel Ringlet a fait sienne cette
double référence. Après son Éloge de la fragilité, il a pris le
parti d'évoquer, en réponse à des questions suscitées par ce
précédent ouvrage, son propre «itinéraire entre Évangile et
actualité»: celui d'un prêtre, journaliste, écrivain, professeur
d'université. À la lumière de ces expériences diverses et
mutuellement interpellantes, il a pris conscience que l'inquiétude
de l'absolu peut se lire à travers les paraboles d'aujourd'hui qui
s'écrivent et se racontent au cinéma, dans la littérature, les
journaux et les autres médias. Ses références privilégiées: Jean
Sulivan, pour qui le grand travail du prêtre consiste à «enfouir un
levain d'éternité dans la pâte de l'instant»; Olivier Clément, qui
lui a révélé «l'urgence du tragique chrétien»; le dominicain
Jean-Pierre Jossua, dont il évoque avec lyrisme le livre majeur:
Pour une histoire religieuse de l'expérience littéraire; le
théologien louvaniste Ad. Gesché, pour qui «la théologie ne dit
Dieu que pour mieux penser l'homme»; Jean Grosjan, dont l'oeuvre
constitue une «théologie poétique».
Il évoque enfin «les Samedis du Prieuré», ce lieu privilégié où il
réside et rassemble une équipe de praticiens d'une «spiritualité de
l'actualité». On ne peut manquer d'être impressionné en présence de
cette somme de lectures et d'expériences qui constitue la trame de
ce livre original et multiculturel. Certains lecteurs la trouveront
peut-être quelque peu accablante et parfois difficile à assimiler
par ceux qui n'ont pas eu le loisir de fréquenter et d'assimiler
autant d'auteurs si divers. Ils n'en reconnaîtront pas moins
qu'elle est enrichissante et donne indiscutablement à penser. - P.
Lebeau, S.J.