Après le livre sur Jean-Baptiste par Pierre Haudebert en 2021 (voir la recension par François Odinet, NRT 144, 2022, p. 326), ce deuxième volume dans la nouvelle collection « Personnages de la Bible » a été écrit par sa directrice Chantal Reynier (professeur d’exégèse biblique au Centre Sèvres, Facultés jésuites de Paris) et concerne le personnage néotestamentaire de Marie de Magdala. Le sommaire – ne se trouvant pas à la fin du livre (comme de coutume en France), mais à son début (p. 7-8) – démontre que le cœur de l’ouvrage consiste en sept chapitres thématiques entourés de deux chapitres introductifs et deux chapitres sur l’histoire de réception de la figure de Marie-Madeleine.

La dernière phrase du livre est en même temps son programme : « [p]our comprendre qui est Marie de Magdala et ce qu’elle représente, il demeure indispensable de se référer, en premier lieu, au Nouveau Testament » (p. 144). Dans la partie introductive de l’œuvre, Reynier nous présente donc une liste des treize occurrences bibliques de Marie-Madeleine (p. 19) : Mt 27,56.61 ; 28,1 ; Mc 15,40.47 ; 16,1 ; Lc 8,2 ; 24,10 ; Jn 19,25 ; 20,1.11.16.18.

En étudiant ces textes, Reynier élucide tout d’abord l’identité de Marie de Magdala en expliquant son nom juif (Myriam), son lieu d’origine (Magdala) ainsi que son statut social (célibataire ; aisé) et sa santé (possédée, c.-à-d. malade, mais guérie par Jésus). Puis, Reynier démontre les accentuations (particulières) des quatre évangiles : p. ex., seulement Luc (8,1-3) raconte la présence de Marie-Madeleine « dès le début » du ministère de Jésus (p. 50) ; « l’évangile de Jean prend soin de dire que quelques femmes dont Marie-Madeleine sont présentes au pied de la croix » (p. 58). « [l]es évangélistes (…) insistent sur le fait que ce sont les mêmes personnes qui constituent les témoins de la mort de Jésus, de son ensevelissement et du tombeau vide » (p. 72). Cependant, selon Mt 27,55-56, les femmes ne sont pas « au mont des Oliviers » (p. 19), mais surtout là (ἐκεῖ), sur place, au Calvaire. Au lieu de « Jn 19,35 » (p. 19), la référence correcte pour la présence des femmes sous la croix de Jésus est Jn 19,25.

De sa perspective exégétique, Reynier est en mesure de réfuter la constatation du pape Grégoire le Grand (590-604) que (1) Marie-Madeleine, (2) la pécheresse de Lc 7,37 et (3) Marie de Béthanie (Jn 12) sont un seul personnage. Les propositions selon lesquelles Marie de Magdala était l’auteure du quatrième évangile (Ramon K. Jusino ; Esther de Boer) ou même la mère de Jésus (Thierry Murcia) sont aussi rejetées (chap. 9).

À travers le livre, l’appréciation pour la personne et le ministère de Marie-Madeleine est exprimée. Voici, deux beaux exemples : « Marie de Magdala et les autres femmes sont les seules à avoir véritablement accompli le parcours “complet” du disciple puisqu’elles “sont avec Jésus” dans son ministère et l’accompagnent même dans sa Passion, jusqu’à ce qu’il rende son dernier souffle et soit déposé dans le tombeau. La mort ne les arrêtera pas. Elles ont le sens du “jusqu’au bout” » (p. 92). « À Marie de Magdala, il [Jésus] demande d’aller enseigner (…) les apôtres, la plaçant ainsi au-dessus d’eux » (p. 95).

Bien que le focus de son livre soit sur le Nouveau Testament, Reynier ne s’arrête pas là. En ce qui concerne l’Ancien Testament, elle examine des parallèles entre la Madeleine d’une part et Ève, la Sulamite et Moïse d’autre part (p. 105-111). Les deux derniers chapitres démontrent comment Marie de Magdala est présentée dans, par exemple, les apocryphes chrétiens, les hagiographies médiévales, les traditions musulmanes, l’art et les films (p. ex. The Da Vinci Code inspiré du roman de Dan Brown). Comme Reynier le constate : « Il est impossible aujourd’hui de décrypter une œuvre d’art – littéraire, iconographique, musicale, cinématographique – sans connaître cette figure et ses composantes » (p. 9).

Ce petit livre savant et peu coûteux de Chantal Reynier est une introduction compacte et, donc, idéale à la figure biblique de Marie-Madeleine. Il reste à souhaiter que beaucoup d’autres volumes paraissent dans cette nouvelle collection très prometteuse. — B. Paschke

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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