Marie et la Sainte Famille. Récits apocryphes chrétiens, t. II. 62e session de la Société Française d'Études Mariales, Nevers, septembre 2005

Charles Perrot
Teología - reviewer : Hubert Jacobs
La session organisée à Nevers en 2005 par la Société française d'Études mariales a continué celle qui avait eu lieu en 2003. Dans les deux cas, les études ont porté essentiellement sur la Vierge Marie dans les récits apocryphes chrétiens. À Nevers, les chercheurs se sont également penchés sur saint Joseph et la Sainte Famille. Cet ensemble de contributions apporte des lumières précieuses à l'intérêt renouvelé que l'on porte aujourd'hui sur les apocryphes.
Charles Perrot étudie la paternité de Joseph selon Mt 1,18-25. Il note que ce récit garde la trace historique des premières réflexions christologiques. On y découvre aussi, à travers le prisme narratif et plein d'images des confessions de foi, le souvenir d'une première interrogation chrétienne sur l'étonnante paternité de Joseph. Enrico Norelli analyse les formes les plus anciennes des énoncés sur la naissance de Jésus par une vierge. Il s'agit de Mt 1,18-25 et de Lc 1,34-35, car, dans un autre passage du NT, on ne peut sérieusement repérer ce motif. Très différents entre eux, ces deux récits sont largement incompatibles et les efforts prodigués pour les harmoniser ont tous échoué. Mais ce qui intéresse surtout l'A. c'est que, malgré leur incompatibilité, ces deux sections présentent des traits communs, onze selon R. Brown. C'est probablement en Syrie occidentale qu'a pu se développer, à la fin du 1er siècle, une christologie très haute, à risque docète, insistant sur la qualité divine et la préexistence de Jésus. On a mis alors, au service de cette christologie, l'idée que Jésus n'était pas né comme les autres êtres humains, mais avait été engendré par une Vierge grâce à l'action de l'Esprit Saint. C'est cette dernière conception que présentent Matthieu et Luc. Le thème de la vierge, mère de Jésus, ne semble donc pas s'être développé d'abord comme un ensemble narratif mais comme un énoncé christologique à partir duquel on a construit différents récits. Tel aurait été le cas pour Matthieu et pour Luc.
Édouard Cothenet étudie, pour sa part, la tradition latine des Transitus, telle qu'on la trouve dans un écrit attribué à Méliton de Sardes. Sa date de rédaction est controversée: pour les uns, ce serait vers 500; pour d'autres, à l'époque franque. Son influence a été extraordinaire sur la piété, l'art, la littérature et ne s'est jamais démentie en Occident. C'est sur le Livre sur l'enfance du Sauveur que se penche Rita Beyers. Il s'agit d'une compilation dont le but était de conserver le matériel apocryphe originaire pour en constituer comme une véritable somme. R.B. présente la genèse du texte, caractérise sa version «Hereford» et s'arrête à l'analyse de trois extraits illustratifs.
Quant à Sylvie Barnay, c'est le Liber specialis gratiae des moniales d'Helfta, composé à la fin du XIIIe siècle, qui lui permet de s'interroger sur la Vierge apocryphe des récits visionnaires. Elle y reconnaît comme un «art de la mémoire» où nous est offert l'un des premiers recueils d'imitation de la Vierge qui ont circulé dans les pays rhénans. Cette voie de sainteté avait reçu son impulsion au XIIe siècle de la spiritualité cistercienne. Les révélations de Mechtilde de Hackeborn forment l'armature du Livre de la grâce spéciale qui nous livre un exemple remarquable de la vie «marieforme».
Ne pouvant rendre compte de toutes les conférences, signalons-en ici le thème: La Sainte Famille dans l'art chrétien au Moyen Âge (Daniel Russo); Comment l'Islam a adopté Marie (François Jourdan); Duvergier de Hauranne, Antoine Singlin, leurs éditeurs et saint Joseph (Michel Dupuy); Les fêtes mariales des offices de saint Jean Eudes et leurs racines dans les Textes apocryphes chrétiens (Daniel Doré); Congrégations religieuses vouées à la sainte Famille (Brigitte Waché). - H. Jacobs sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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