Il faut glisser sur le style habituel de l'A., ou s'y accrocher, car il ne dessert pas le propos (l'iconoclasme est-il le paradoxe du portraitiste?). On reconnaîtra aisément que, du point de vue de la méthode hagiographique, l'ouvrage est remarquable. Il reprend, pour en tracer les limites, les «vies, morts et miracles» qui avaient abouti au livre de Purcell, The Quiet Companion (1970). Mais il les englobe dans l'analyse introspective, chère à R. Aron, de l'humanisme «navré» («gentillet», dit aussi B., p. 239, ou «cassé», p. 317) du XVIe siècle. Ainsi sont repérés les faits de conscience de F., dans la réalité de l'expérience qui a conduit le «pèlerin d'un lieu à l'autre dans le monde» (Lettre à Ignace, 6 mars 1546, p. 218). Les exégètes de la mystique favrienne (Plaza, Certeau, O'Leary) sont discutés au regard de l'objectivité de l'expérience du discernement des esprits dans le Mémorial, où la doctrine tient une grande place.
F. a vécu en un temps de réforme «à faire, et sur soi d'abord» (p. 317). Ignace, les Exercices étaient là; l'amitié, la Compagnie de Jésus par là même, aussi: on appréciera l'analyse du texte de la délibération des premiers pères, appelé «le discernement des trois mois», de mars à juin 1539 (p. 128-134). Elle dit ce qu'était la compagnie pour P.F. (corédacteur de la Versio Prima 1 des Exercices, vers 1534, selon l'hypothèse de B.): un humanisme discerné. Et l'on comprend alors que «l'optimisme favrien n'est ni le seul produit d'un tempérament heureux ni le seul résultat d'un volontarisme idéologique; il est une intelligence de ce que Dieu […] fait de bien pour nous, une intelligence que lui-même nous donne dans la lumière de nos alliances avec lui» (p. 204). - A. Massie sj