Tout en affirmant l'autonomie du monde, la modernité semble souvent
faire allusion à une possible intervention divine: si Dieu le
voulait, il n'y aurait aucun mal et le monde serait parfait. Kant
proclame dès lors l'échec de la théodicée: comment accepter un Dieu
qui, bien que pouvant, ne veut pas, ou bien qui, voulant, ne peut
pas? Lorsqu'on s'appuie ainsi sur le mal pour justifier l'athéisme,
c'est cependant comme si on niait l'autonomie du monde, que par
ailleurs on ne cesse d'affirmer.En se proposant de « repenser
le mal », ce livre part dès lors de l'autonomie du monde pour
développer sa réflexion par étapes. Tout d'abord la
« ponérologie » s'efforce de montrer que la finitude rend
inévitable l'apparition du mal. La « pistéodicée », à
laquelle aboutit l'ancienne théodicée, est alors conduite à
reconnaître, dans toute prise de conscience déterminée du mal,
l'expression d'une « foi » exigeant à son tour d'être
justifiée, qu'il s'agisse aussi bien de la « nausée »
sartrienne que de quelque forme d'espérance religieuse. La
« pistéodicée chrétienne » peut montrer ici sa cohérence
en présentant Dieu comme l'« Anti-mal ». Une voie plus
courte peut être proposée, comme le fond véritable de la vision
ancienne, appuyée sur la confiance. - S. Decloux sj