Le troisième et dernier tome des sermons est constitué
principalement d'homélies évangéliques, souvent courtes, au style
raffiné (il cite Horace!), riche en allitérations et assonances. Et
en mystique des nombres: les trois jours au tombeau symbolisent
l'assentiment de la Trinité… Malgré certaines formules ambiguës
(«Dieu et l'homme sont mélangés [misceri] en un corps… l'Enfant
dans le sein de Marie était divin, non humain…»), P.Ch. ne peut
être accusé de monophysisme. Par contre, il échappe difficilement,
lui qui le premier a utilisé l'adjectif déicide (qu'Augustin
considère comme inapproprié) au reproche d'antijudaïsme. Le figuier
stérile, c'est, allégoriquement, la Synagogue, cette engeance de
vipères, que l'incrédulité enchaîne et que la jalousie aveugle. Son
sol a été épuisé par le labour incessant et l'exploitation
intensive de la Loi: il a produit du son au lieu de grain, des
chardons au lieu de vignes; il sera brûlé, ce qui le rendra prêt
pour la charrue de l'évangile, au privilège des Gentils… Pourquoi
la femme était-elle courbée? (Lc 13) Parce que, ayant fui les
sacrilèges des païens, elle avait à supporter le fardeau plus lourd
encore de la Synagogue. Quant au centurion romain (Lc 7), il
renvoie le Juif incroyant en lui disant Va-t-en! tandis qu'il
appelle le Gentil, venu à la foi, en lui disant: Viens!… Apprenons
au passage que S. Jean est ce jeune homme qui s'est enfui nu, que
S. Pierre est le gardien des portes du ciel, et que l'un ou l'autre
texte est peu féministe: la femme est la source du mal, l'auteur du
péché, le chemin de la mort, la cause du tombeau, le porche de
l'enfer… Retenons les divers sermons sur Lazare et l'homme riche,
ainsi que les descriptions d'Hérode et du Baptiste dans une homélie
qui, étrangement, se conclut par un appel à la modération dans les
réjouissances. Un recueil de lecture agréable. Finement traduit. -
P. Detienne sj