Pas plus que de lumière, d'oxygène ou de vitamines, l'homme ne peut
se passer de féminin… Rien ne s'est développé en moi que sous le
regard et sous l'influence de femme… Accumulant les citations d'un
Teilhard qu'elle vénère mais qu'elle n'a pas connu, l'A. évoque ses
«amitiés féminines» (elle cite une vingtaine de noms), telles
qu'elle les découvre dans les lettres reçues de lui, leurs propres
missives ayant malheureusement disparu. Que leur écrit-il? À
Marguerite Teillard-Chambon, sa cousine: «Nous domestiquerons pour
Dieu les énergies de l'amour». À Léontine Zanta, philosophe: «Vous
me forcez et m'aidez à penser beaucoup». À Lucile Swan, à qui il
parlait de «notre livre» (Le phénomène humain) et qui finira par
s'éprendre de lui: «Serais-je complet sans vous? Vous êtes devenue
une part de ma vie la plus profonde». À Claude Rivière: «Il y a
tant de choses qui dorment en moi et qui restent sommeillantes
parce que je n'ai personne à qui les dire». De Rhoda de Tera, qui a
pris soin de lui durant ses dernières années et chez qui il est
mort, il dira: «Elle représente pour moi une sécurité
psychologique». Envers Jeanne Mortier, dont il fera son légataire
universel, il se montre respectueux et cordial mais un peu distant:
«Je sens et j'apprécie profondément ce que m'apporte votre
inlassable puissance de collaboration et de dévouement». Sur toile
de fond de ces divers portraits, l'A. insiste sur l'état dépressif
chronique de T., son inquiétude et ses angoisses.
Une deuxième partie de l'ouvrage développe différents thèmes. Nous
en retenons deux: la dévotion de T. envers Marie: sans doute, si
j'avais eu moins d'amies, me serait-elle plus vivante… mais
avais-je le choix?; la chasteté féconde: la joie de dépasser la
tempête apaisée… se rendre sourd et aveugle devant certaines
invites. Un ouvrage de vulgarisation qui ne s'embarrasse pas de
références, agréable et bienfaisant. - P.Detienne sj