Avant d'aborder cet ouvrage, il convient d'avoir bien à l'esprit la
perspective de l'A. : écrire une « simple histoire qui, à
l'écart de toute visée apologétique, résiliente ou culpabilisante,
ne veut ni célébrer ni condamner, mais simplement faire son office
qui est de constater pour expliquer, sinon comprendre ; car si
l'avenir peut dépendre de notre capacité à se souvenir, l'histoire
réclame plus que jamais ses droits » (p. 8). Cela dit, le
propos de F. Hildesheimer était une gageure. D'autant que dans
le cas français, au fil des siècles, plus que jamais la tension
entre l'universalité à laquelle le message évangélique prétend et
l'Hexagone où le gallicanisme finit par devenir une pièce maîtresse
de l'échiquier ecclésial, fut particulièrement forte, et que le
décentrement de l'Église de l'Europe vers les jeunes continents et
les crises récentes pourraient faire croire à une faillite presque
irrémédiable, en particulier précisément en France. Le lecteur sera
sans doute parfois un peu dérouté par le parcours proposé par l'A.
qui n'apparaîtpas toujours strictement chronologique. Non que la
chronologie ait été gommée, mais l'A. a souvent privilégié le
développement de thèmes sur la longue durée ; un exemple parmi
tant d'autres : l'approche critique de la Bible et ses
conséquences sur la compréhension et l'expression de la foi
chrétienne qui s'étale sur plusieurs siècles. L'A. a-t-elle réussi
son entreprise ? On sait qu'une synthèse est toujours un
exercice périlleux. Au fil de la lecture, on pourra toujours
trouver que telle ou telle approche mériterait un autre traitement.
Le point quelque peu problématique est sans doute que l'on ne
perçoit pas nécessairement très exactement à quel public l'A.
s'adresse ; par ailleurs, celle-ci me paraît présupposer une
culture relativement étendue dans le chef de son lecteur. Or, il
faut bien constater que l'histoire, générale comme religieuse, est
souvent fort ignorée. C'est sans doute un des maux les plus tristes
de notre temps. De là à faire de l'histoire simpliste, on ne
saurait y encourager aucun historien qui tente de faire son métier
honnêtement.On appréciera, outre la chronologie détaillée des
p. 445-457, la bibliographie générale qui inclut notamment
certaines réflexions plus générales, en particulier le passage
consacré à l'« Historiographie : de l'histoire
ecclésiastique à l'histoire religieuse » (p. 439-442) qui
expose les grandes étapes de la manière dont l'« Histoire de
l'Église » fut traitée au fil du temps.Un livre, parmi tant
d'autres qui traitent du sujet, mais qui, à sa manière, aidera à
connaître et surtout à comprendre. - B.J.