L’influence des écrits de Maurice Zundel (1897-1975) ne cesse de croître. L’œuvre imprimée du théologien et prêtre suisse comprend une vingtaine de livres, beaucoup d’articles mais aussi une œuvre orale, recueillie par sténogramme ou par enregistrement, dont l’importance est considérable. Il devenait donc urgent de prévoir une édition des œuvres complètes qui permette d’avoir accès à tous les textes disponibles, un choix étant nécessaire parmi les homélies et entretiens pour éviter les redites. Marc Donzé, grand connaisseur de l’œuvre de Zundel, s’est attelé à cette tâche ardue : 9 vol. selon l’ordre chronologique sont prévus, le dernier étant surtout constitué d’inédits et de quelques extraits de correspondances.

Le titre du 1^er vol. donne son contenu : il regroupe les textes parus entre 1918 et 1935 et comprend les deux éditions, fort différentes, du Poème de la Sainte Liturgie (1926 et 1934). C’est sous le pseudonyme de « frère Benoît » que Zundel fit paraître ce texte qui eut un retentissement considérable. Très marqué par un séjour de 2 ans à l’abbaye bénédictine d’Einsiedeln, Zundel eut moins à cœur d’expliquer que de faire vivre au chrétien la divine liturgie eucharistique, selon l’expression des Églises d’Orient. La 1^re éd., très diffusée, séduisit de nombreux lecteurs dont l’Abbé Montini, futur pape Paul vi, qui la fit traduire en italien. Elle développe ce que Zundel nomme le « sens catholique » qui n’est rien d’autre que l’expression de collaboration vivante de la grâce de Dieu fraternelle et universelle, seule capable d’accomplir la réalité humaine qui est d’abord (mais pas seulement !) « esprit » (p. 457). Si les textes de Zundel manifestent des développements théologiques au fait des recherches de son époque, ils cherchent d’abord à transmettre une « expérience » de vie. Sa parole flamboyante fut incomprise en son temps : elle apparaît aujourd’hui prophétique. L’essentiel est dans une disponibilité totale de l’âme à laquelle la liturgie de la messe « Plérôme de la Croix » (p. 306) justement introduit et dans l’approche mystique du Dieu d’amour lui-même pauvre et fragile à l’image de celui que chante le Poverello d’Assise (p. 325) qui compta tant pour Zundel : « Mystère de la Pauvreté dans la transparence de l’être dépouillé de soi-même et diaphane à la présence de Dieu » (p. 208). Outre les 2 éd. du Poème de la Sainte Liturgie, le vol. propose au lecteur des homélies ou des articles de la même époque qui prolongent la méditation zundélienne.

Il faut remercier Marc Donzé et la Fondation Maurice Zundel de nous permettre de (re)découvrir ces pages flamboyantes dont l’actualité n’échappera pas au lecteur du xxi^e s. — M.-J. Coutagne