La catégorie morale de péché structurel. Essai de systématique
M. NebelMorale et droit - Recenseur : Paul Lebeau s.j.
L'A. rappelle ensuite comment plusieurs textes importants du Magistère de l'Église ont abordé ces questions et fixé quelques principes d'interprétation: les documents de Medellin et de Puebla, puis les deux interventions de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi sur la Théologie de la Libération (1984 et 1985), et l'important Synode Réconciliation et Pénitence. Il souligne ensuite l'importance des textes de Jean-Paul II: Réconciliation et pénitence (1984), Sollicitudo rei socialis, Tertio millenio adveniente et Incarnationis Mysterium, qui reprennent la problématique à partir des demandes de pardon formulées par le Pape. On passe ainsi d'une controverse portant sur l'existence de «structures de péché» à une discussion portant sur la grâce de réconciliation qui, dans le Christ, échoit à l'Église pour ce péché spécifique.
Après avoir passé en revue certains travaux (Mc Kenna, Mynatty et O'Keefe), l'A. précise ainsi l'objectif de sa thèse: fonder en théologie morale la catégorie de péché structurel, «non pour s'appesantir de manière morbide sur le péché du monde, mais, au contraire, afin de le démasquer et d'oeuvrer à la libération et à la réconciliation accomplies dans le Christ Jésus» (p. 23). Il s'agissait donc d'«élaborer une théologie du péché qui rejoigne la dimension communautaire de la personne», ce qu'autorise «une relecture du péché du peuple sous l'Ancienne Alliance» (p. 25). L'A. développe alors cette thèse en trois temps: 1. L'examen de deux situations sociales, générées l'une par l'institutionnalisation de la torture au Brésil (p. 31-81), l'autre par la corruption politique et les marchés publics en Italie du nord. 2. Deux éléments d'histoire relatifs au concept de la structure de péché dans le Magistère, en passant en revue l'oeuvre d'Abélard et de Thomas d'Aquin, et ensuite l'usage de l'analogie dans la théologie du péché selon Rahner, Schoonenberg et Balthasar. 3. Une 3e partie qui aborde de front la systématique, et pose les bases d'une anthropologie politique conforme aux hypothèses formulées antérieurement. Les chapitres 6 et 7 «forment un diptyque qui vise, à travers une théologie narrative, puis une théologie systématique, à formuler une définition formelle du péché», en explorant les richesses qu'une théologie biblique recèle quant à la dimension sociale du péché, à la lumière de la théologie de la grâce de Balthasar - ce qui permet de conclure, dans le chapitre 8, à l'existence d'un péché structurel dont l'A. définit les caractéristiques. À cet égard, qu'il nous soit permis de souscrire modestement à ce choix d'un théologien qui, comme le note judicieusement l'A., «endosse pleinement la logique de la Révélation, qui veut que ce ne soit qu'à la lumière du Crucifié que le mal commis soit pleinement dévoilé». Non sans souligner avec lui que «d'autres arguments militent encore en sa faveur, dont le moindre n'est pas la cohérence d'une pensée éminemment théologique, qui traverse la cloisonnement des diverses disciplines théologiques en une synthèse stupéfiante». - P. Lebeau sj