La vie d'Aelred, abbé de Rievaulx, tr. P.-A. Burton

Walter Daniel
Biographies - Recenseur : Paul Detienne s.j.
Aelred, abbé cistercien de Rievaulx, meurt en 1167. Walter Daniel, le moine qui a été son secrétaire et son infirmier, consacre à son souvenir une Vita qui, accompagnée d'une Lamentatio et d'une Lettre à Maurice, nous est parvenue dans un manuscrit unique datant du XIVe siècle. C'est un éloge inconditionnel d'un admirateur partial, dont le style abonde en jeux verbaux, en clichés oratoires et en lieux communs empruntés à la littérature hagiographique (la vie de S. Antoine par S. Athanase, la vie de S. Martin par Sulpice Sévère…). L'A. compare Aelred à Noé, à Moïse, à David, à Salomon. Ses citations évangéliques sont osées: Mon fils, pourquoi as-tu agi de la sorte envers moi? demande Aelred à un novice fugueur. Si tu le veux, tu peux me guérir, dit à Aelred un homme qui a avalé par mégarde une grenouille vivante qui lui ronge les entrailles, et qu'Aelred guérit.
L'A. nous renseigne en passant sur l'Écosse et les moeurs du temps: «les plus chastes ne changent de partenaires qu'une fois par mois; un homme vend sa femme pour le prix d'une génisse». Certains passages de la Vita ont soulevé deux objections, auxquelles la Lettre à Maurice tente de répondre. La première a trait au fondement historique des miracles du saint; l'A. la réfute en fournissant une liste de témoins oculaires, en blâmant l'incrédulité des objecteurs, et en ajoutant une nouvelle série de miracles, dont celui-ci, délicieux: un incendie a résisté à moult tonneaux d'eau et barriques de vin déversés par les moines; Aelred, pas encore novice, répand une carafe remplie d'un breuvage anglais sur les flammes «qui s'éteignent sur le champ comme si la mer les avaient recouvertes». La seconde objection concerne deux expressions litigieuses. L'A. les justifie en évoquant un traité attribué à Cicéron. S'il a écrit que, à la cour d'Écosse, le saint se conduisait en moine, c'est par synecdoque (il n'était pas parfaitement chaste, mais il était vraiment humble). S'il a écrit que le cadavre d'Aelred (dont, selon les descriptions minutieuses de l'A., le décès serait dû à un cancer du carrefour aéro-digestif) exhalait un parfum d'encens, c'est par hyperbole. De toutes façons, conclut l'A., l'important, ce ne sont pas les miracles, c'est la charité que les miracles manifestent. La traduction est d'une grande fidélité; de nombreuses notes mentionnent les passages obscurs dont la traduction est incertaine. - P. Detienne, S.J.

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