Après nous avoir présenté ailleurs deux traductions catholiques
françaises du NT (celle de Port-Royal, dite «de Mons», publiée en
1667 par Sacy, et celle de l'oratorien Amelotte qui lui est
contemporaine), l'A. analyse ici une dizaine d'autres traductions,
et autant de commentaires. Retenons les deux premières. Le NT dit
«des jésuites» (1697, 1703) manifeste un littéralisme strict, écho
du traditionalisme exacerbé du p. Hardouin, pour qui la Vulgate a
été déclarée «authentique» par le Concile de Trente parce qu'elle a
été écrite et dictée en latin à ses disciples par le Christ
lui-même! Pour lui, l'Écriture n'est qu'un élément de la Tradition…
une Tradition qui est elle-même assimilée aux principes du Concile
de Trente, et qui «se possède dans l'ignorance». Il reproche à
Port-Royal et aux jansénistes de faire de la lecture de la Bible
une obligation morale pour tous les fidèles, hommes et femmes,
alors que le Concile ne l'autorise qu'au laïc capax qui en
a reçu la permission du clerc. Il accuse ces athei detecti
d'avoir remplacé la foi par l'intelligence, d'avoir fait du
Dieu-Personne un Dieu-Idée, et de réduire la religion à la morale.
Il fustige, chez eux, le primat de l'objet d'étude sur le sujet
priant. Niant la valeur de la tradition écrite, il prétend que les
écrits d'Augustin et d'autres auteurs ecclésiastiques ont été
falsifiés au XIIIe s. Dans son NT dit «de Trévoux» (1702),
l'oratorien Richard Simon garde la Vulgate comme texte de base,
tout en donnant en marge les variantes du texte grec et en
traduisant à partir de l'hébreu les citations de l'AT. Bossuet lui
reproche ses «minuties grammaticales», qui effacent la pertinence
des lectures spirituelles d'un texte sacré considéré désormais
comme un simple texte profane et qui dénient, au nom de
perspectives philologiques, toute valeur aux lectures tirées des
Pères et des auteurs ecclésiastiques. Adversaire de toute
«mystiquerie», R. Simon ne remplace-t-il pas la lecture spirituelle
(ruminatio) par une lecture érudite? Une 2e partie de
l'ouvrage comporte une douzaine de monographies particulièrement
intéressantes: Port Royal, le jansénisme et le Concile de Trente;
Voltaire et Dom Calmet, ou les malheurs du sens littéral; les
traductions de la Bible, le jansénisme et la révolution; la lecture
de la Bible: lecture de croyance et/ou lecture de savoir… À lire. -
P. Detienne sj