L'A., qui a édité jadis la Lettre sur la toute-puissance divine de
Pierre Damien (1007-1072), nous offre, en ce millième anniversaire
de sa naissance, une évocation du saint docteur, inspirée de son
oeuvre écrite (lettres, sermons, opuscules), source capitale pour
la connaissance de son temps. Sa prose est tullienne, son
vocabulaire riche, son humour plaisant. Ses sermons, qui citent
fréquemment Grégoire le Grand et qui ignorent les Pères grecs,
exaltent davantage la croix que la résurrection. Ils adoptent une
exégèse allégorique, qui privilégie l'AT, rempli de figures
d'intelligence spirituelle: Juda y est appelé lionceau, à l'image
du fauve qui cache ses traces avec sa queue pour déjouer les pièges
de l'ennemi trompeur. Se désignant comme Pierre, moine pécheur, il
fustige, dans ses lettres, la simonie et les aberrations sexuelles
des évêques et des prêtres. Sa position concernant les deux
pouvoirs paraît ambiguë: il faut qu'on trouve le pape dans le roi
et le roi dans le pape. Par ailleurs: au prêtre de compatir; au
juge de punir! Proclamant que le maintien du péché est beaucoup
plus grave que sa punition par la mort, il loue Otton III d'avoir
énucléé trois comtes qui s'emparaient du bien d'autrui: trois ont
été rendu aveugles et tout le peuple a vu briller la lumière du
repos désiré. Au terme de son ouvrage, l'A. démontre que c'est à
tort que Gilson et Bréhier ont considéré Pierre comme
antidialecticien. - P. Detienne sj