Partant d’une citation de saint Jean-Paul ii – « l’athlète de Dieu », c’est lui – A. Bouthéon examine dans cet ouvrage en quoi le sport pourrait bien être un « signe des temps ». Le sous-titre le précise : il s’agit d’un « manifeste », un programme destiné à évangéliser le sport, réalité indépassable de notre postmodernité.

La première partie décrit les caractères du sport dans le monde occidental et globalisé : quasi-religion universelle, largement récupérée par le grand marché et les nationalismes, idolâtrie du corps (sur)humain. A priori, pas de point d’attache avec le message chrétien.

Pourtant, l’A. entreprend de montrer alors que la religion de l’Incarnation présente justement des convergences frappantes avec les aspects les plus fondamentaux du sport : l’approfondissement, dans l’effort, de l’union entre corps et conscience jusqu’à la beauté du geste juste, les richesses des liens dans une équipe de sport collectif ou un club, la perception de la finitude et l’ouverture à la Grâce, entre autres exemples.

Il poursuit en comparant saints et champions, arbitres et clercs, stades et églises dans une série de parallèles audacieux. Enfin, il relativise la possibilité de « valeurs sportives » sui generis, mais souligne l’intérêt des règles morales et sportives, la valeur du combat spirituel et de la compétition, les trois étapes communes de : l’effort de l’apprentissage, la libération du geste ainsi peaufiné et la joie du jeu qui s’ensuit.

Sport et vie spirituelle lui semblent dès lors bien apparentés, ou du moins complémentaires. La passion contemporaine du sport est alors une « préparation évangélique » dont le christianisme devrait pouvoir être l’aboutissement.

A. Bouthéon écrit dans un style vigoureux et poétique à la fois. Ses vues sont inspirantes et souvent suggestives. Parfois ses comparaisons forcent le trait et son angle d’approche est aussi très spécifique : on aurait pu trouver profit à décrire l’approche antique du sport et approfondir le rejet chrétien de celle-ci. On aurait pu aussi reprendre les débats autour de Coubertin et de son olympisme, l’opposition de l’hébertisme ou les développements asiatiques autour des arts martiaux. Mais l’essentiel du message de l’A. reste de montrer une voie précieuse pour éviter le spiritualisme malvenu et renouveler la perception de la particularité chrétienne… — G. Kirsch