Dans la vie et la pensée de Dietrich Bonhoeffer, né dans une
famille luthérienne de Breslau en Silésie (aujourd'hui Wroclav, en
Pologne), on peut distinguer trois périodes: le stade universitaire
(1927-1933), le stade de l'Église confessante (1933-1939), le stade
politique (1939-1945). Arnaud Corbic, franciscain, se pose la
question: «Comment le Christ peut-il devenir aussi le Seigneur du
non-religieux dans un monde devenu majeur?» (p. 18). L'A. perçoit
clairement le danger découlant d'un parcours aussi contrasté et
brutalement interrompu par son exécution en 1945, sur l'ordre
exprès de Hitler. Comment rendre compte de ce que B. lui-même
écrivait à son ami Eberhard Bethge, le 22 avril 1944: «J'ai
beaucoup appris, mais je ne crois pas avoir beaucoup changé […]
nous n'avons vécu, ni l'un ni l'autre, une rupture dans notre vie»
(cité p. 17). Pour éviter de privilégier, selon l'expression même
de B., «le dernier Bonhoeffer», l'A. esquisse dans un premier
chapitre, la théologie de «l'avant-dernier». Un second chapitre
décrit, sous sa forme fragmentaire, la doctrine du dernier B.
(lettres de prison, réunies après sa mort par son ami Bethge). Dans
une relecture critique, un troisième chapitre s'attache à la
déclaration de B. qu'il nous faut vivre dans ce monde etsi
deus non daretur (comme si Dieu n'était pas donné).
L'A. montre que c'est en théologien de la foi et de la réalité et
non en vertu d'un athéisme né de la mort de Dieu, que B. rejette un
Dieu qui ne serait qu'un «bouche-trou», car la gloire de Dieu,
c'est l'homme vivant (Irénée).
Le volume donne, en annexe, la traduction française de certaines
lettres écrites par B. en prison. Les notes sont placées partie en
bas des pages, partie à la fin du volume.
On saura gré à l'A. d'avoir mis en lumière la pertinence et la
valeur des questions toujours actuelles que pose cette théologie. -
L. Renwart, S.J.