L’encyclique est-elle une pierre d’achoppement pour la morale conjugale ou une borne, repère à ne pas franchir ? Plus de 50 ans après sa parution, l’A. cherche à dépasser cette opposition en montrant qu’elle est une pierre milliaire : une stèle témoin. Sa thèse est la suivante : HV ne rigidifie pas la doctrine morale de l’Église mais elle oriente son développement. De la perception d’un signe de contradiction, il faut parcourir un chemin pour comprendre la richesse symbolique de l’acte conjugal.

Il s’agit d’abord de définir le centre normatif de la doctrine, sa place dans la Tradition et étudier la double signification de l’acte conjugal : prendre conscience d’abord de la coprésence dans un seul acte d’une double signification, de ce qui différencie les deux significations (la finalité procréative suit un rythme cyclique !) et de la dissociation possible entre deux significations anthropologiques et non pas seulement deux processus biologiques. L’explication éclaire les enjeux. Le chap. 5 explicite le « privilège » de la signification procréative en soulignant le caractère illicite de la contraception et licite des méthodes naturelles. L’A. souligne les limites du personnalisme d’HV et l’approfondissement opéré par Jean-Paul ii. Il prend acte du conflit qui existe entre les deux significations et de l’oubli fréquent de la valeur unitive de l’acte conjugal.

Les deux derniers chap. sont originaux et attirent l’attention. L’acte conjugal est exposé dans sa richesse symbolique. À cette lumière sont mises en évidence de multiples significations : l’horizon est élargi au niveau des valeurs en jeu. Il s’agit aussi de rendre compte de la passion érotique présente dans la signification procréative : cet aspect est valorisant. Par ailleurs, le rappel de l’importance de la conscience est bien présent : il devrait s’élargir aux consciences personnelles qui sont appelées à poser un jugement de conscience commun. Est-ce toujours possible ? Par ailleurs, laisser tout à la mesure d’un débat de conscience, c’est perdre un peu la saveur et l’originalité de ce que les autres chapitres déployaient de l’enseignement d’HV.

Des critères de discernement sont proposés pour vivre en vérité la « donation personnelle réciproque ». Le critère fondamental est celui de la foi. Les époux sont appelés à correspondre au dessein créateur de l’auteur de la vie : ce dessein s’accomplit dans la Pâque du Christ qui sauve tout amour. Ce critère n’est pas d’abord pratique mais il permet de garder l’amour conjugal comme une vocation et la procréation responsable comme un acte bon, sans plonger seulement dans la matérialité des moyens. Ce critère peut mener ainsi à la décision responsable de ne pas procréer. Il convient ensuite d’accomplir les actes conjugaux en tant qu’ils expriment cette unité homme-femme : « une seule chair ». Les époux ne peuvent ainsi rien exclure de leur don mutuel de soi. C’est à cette lumière que les époux découvrent parfois le caractère impraticable ou l’impossibilité de vivre l’abstinence de rapports conjugaux. À eux de discerner « pourquoi et comment ». Certains seront amenés à réguler la natalité par une contraception artificielle : une grille de questions peut les aider à évaluer cette décision. L’A. suggère aussi que toute décision conjugale soit prise en cherchant la plus grande fécondité possible.

Aujourd’hui, il est étonnant d’arriver à ce type de critères sans parler de la loi de gradualité. Tout discernement des moyens de régulation devrait s’y référer en gardant à la conscience la loi anthropologique affirmée dans HV et l’existence d’une grâce spécifique du mariage offerte à chaque époux pour cheminer vers le respect commun des significations de l’acte de don mutuel. — A. Mattheeuws s.j.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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