Dans l'étude de la philosophie d'Ockham et de ses problèmes, Marino
Damiata avait originellement prévu trois tomes, parus de 1996 à
1998: la connaissance, Dieu, la nature. Au cours de la rédaction de
ceux-ci, il s'est aperçu que restaient dans l'ombre des thèmes ou
des aspects de la doctrine de son auteur. Il leur consacre ce
volume. Pour O., la personne ne se réduit pas à l'âme, elle est un
tout intelligent et libre, mais il se demande si l'âme intellective
en est la seule forme. Il opte pour une âme sensitive comme forme
de corporéité. Les «habitus» jouent un grand rôle dans la
philosophie d'O.: ils ne sont pas innés, mais acquis. Le rapport
entre un habitus vicieux et la grâce lui pose un grave problème.
Concernant la liberté, indéfinissable selon lui, celle-ci peut se
porter de façon contingente à tel ou tel acte, mais pour que
ceux-ci soient méritoires, la grâce est requise. À chaque type
d'acte correspond un habitus, mais ce n'est pas le cas, à
proprement parler, pour la sensibilité, qui ne connaît que des
actes et des passions. Existe-t-il des actes indifférents? La
réponse est négative pour ceux qui proviennent de la volonté: ils
sont nécessairement bons ou mauvais. Il en va de même des habitus
volontaires. Toutefois, O. se pose le problème de la cohabitation
possible chez un pécheur converti de l'habitus de la haine de Dieu
avec celui de la grâce. Dans l'étude de la vertu comme acte et
comme habitus, O. ajoute aux trois degrés d'Aristote qu'il
considère comme purement philosophiques, deux autres supposant la
grâce. Concernant la science morale, il situe le rôle de la
prudence et les rapports des vertus morales avec celle-ci, entre
elles et avec les vertus théologales. Bien qu'il ait toujours
devant les yeux la nette distinction entre la nature et la foi, il
admet toutefois que Dieu pourrait, «de puissance absolue», accepter
comme méritoire un acte d'amour naturel posé par une personne qui
n'aurait pas la foi ou ne la connaîtrait pas.
Sur les rapports entre la volonté et la foi, O. se demande quelle
est l'influence de celle-ci sur la volonté, le lieu où se situe la
foi (dans l'âme ou au dehors?) et sur la différence entre l'amour
d'amitié et celui de concupiscence. À propos de la résurrection, il
tient que c'est bien le même homme qui a vécu et qui ressuscite,
non qu'il ait la même matière, mais parce qu'il conserve la même
âme intellective. Nous touchons ici, note D., une des raisons pour
lesquelles l'école franciscaine a défendu avec ténacité la
multiplicité des formes du composé humain.
Dans un intéressant Appendice, D. s'efforce de «lire entre les
lignes» de l'oeuvre d'O. un portrait moral de celui-ci. C'est la
figure nuancée d'un homme droit et sincère qui n'hésite pas à
prendre librement position, selon l'habitude du temps, entre les
diverses opinions alors reçues. S'il a durement combattu des hommes
d'Église parmi les plus grands, «il est sûr par ailleurs qu'il l'a
toujours fait en croyant et en chrétien». - L. Renwart, S.J.