L'A., connue pour ses positions assez claires contre tout
concordisme dans le domaine du dialogue islamo-chrétien (voir
p. ex. La mésentente, avec D. Urvoy,
recensé dans la NRT 137, 2015, p. 680),
nous livre ici un tour d'horizon qui touche à une variété de sujets
liés au dénominateur commun « Islam ». L'ouvrage est
composé de quatre sections englobant 36 chap. Le lien entre
eux est si léger qu'on peut lire chaque chap. pour lui-même. Dans
la 1re section « Les données
fondamentales », on trouve p. ex. le titre « La
notion de personne en Islam » (chap. 2). L'A. étudie la
tentative du philosophe marocain Mohamed Aziz Lahbabi de trouver
dans ce terme un fondement anthropologique commun entre musulmans
et chrétiens (notamment dans son ouvrage Le personnalisme
musulman, réédité sous le titre La personne en
Islam, Namur, Lessius, 2015 ; recensé dans
la NRT 138, 2016, p. 499), qui est inspiré
par Emmanuel Mounier et Jean Lacroix avec son histoire conceptuelle
dans les différentes branches de la pensée islamique. Elle en
découvre un aspect important : la disparition de
la falsafa (en arabe : philosophie) comme
discours majeur a restreint le travail au concept, avant tout dans
le domaine anthropologique. C'est aussi la raison pour laquelle les
travaux importants dans ce domaine d'Avicenne via Abū-l-Barakāt
al-Bagdādī jusqu'à Fahr al-Dīn al-Rāzī (le grand islamologue Roger
Arnaldez a comparé les contributions du dernier avec les
philosophies de Gabriel Marcel et Martin Buber) sont tombés dans
l'oubli. Les philosophies modernes de la personne inspirées par
l'Islam évitent paradoxalement la falsafa et se
référent directement aux textes fondateurs. Il y reste beaucoup à
découvrir et à penser. Cet article est un bon exemple de
l'importance du travail fourni par les islamologues et les
arabisants qu'on peut aussi remarquer dans les autres trois
sections « Aspects particuliers » (sur la famille,
l'économie, la société, la politique, l'idéologie), « Islam et
christianisme » et « Quelques aspects culturels
significatifs ». Mais le dernier chap. exprime un souci de
l'A. : ce travail est en danger car, selon lui, l'enseignement
de l'arabe est en plein déclin en France. Et la langue est la clé
centrale pour accéder à tout un univers (aussi, mais pas seulement,
musulman). - M. Kneer