On recommande la lecture de ce petit ouvrage collectif qui veut « réexaminer l’identité juive de l’Église ». Très liés au mouvement « Toward Jerusalem Concil ii » (TJCII, <www.tjcii.org>), qui œuvre à l’unité des Juifs et des Gentils, les A. posent les fondements d’une théologie « post-supersessioniste », c.-à-d. d’une théologie au-delà de la théologie de la substitution. Les deux premières contributions prennent acte du congé donné à cette théologie de la substitution, qui a longtemps prévalu en régime chrétien, et font l’inventaire des dégâts qu’elle a entraînés : 1. l’unité perdue de l’Église, originellement composée des Juifs et des Gentils, 2. l’expression scripturaire de cette unité perdue, dont le marcionisme est le tristement célèbre avatar, 3. la « désincarnation » du Christ, dès lors qu’il est coupé du peuple dans lequel il a pris naissance. Après ce sévère diagnostic, la troisième contribution soutient que Jésus est toujours le Roi des Juifs, de sorte que la christologie néotestamentaire est une « christologie d’Israël » (p. 101). L’exégèse des récits bibliques mériterait toutefois d’être davantage approfondie, pour être plus convaincante. L’ouvrage s’achève sur une prescription audacieuse, qui repose sur la conviction que « l’ecclésiologie du Nouveau Testament est aussi une ecclésiologie d’Israël » (p. 101) : les défis posés par le judaïsme messianique à l’Église sont passés en revue, dans le sillage de l’œuvre de Peter Hocken. Disons, pour les résumer d’un mot, qu’il s’agit de retrouver l’unité originelle de l’Église telle que Paul l’évoque en Ep 2 (qui dépasse donc l’œcuménisme auquel nous pensons spontanément), au moyen d’une interaction enrichissante des conceptions eschatologiques juive et chrétienne. Cet ouvrage, préfacé par le Card. Schönborn, dont l’action en faveur du dialogue entre l’Église catholique et les institutions juives messianiques est connue, pose les bases d’un large travail de renouveau théologique, et plus largement, ecclésial. Il invite en effet à contempler que le Christ Jésus est à la fois « la lumière qui se révèle aux nations et celui qui donne gloire à son peuple Israël » (Lc 2,32). — N.J.