Justice et religion en Languedoc au temps de l'Édit de Nantes. La Chambre de l'Édit de Castres (1579-1679)

St. Capot
Histoire - Recenseur : Bruno Clarot s.j.
L'Édit de Nantes (1598) avait créé cinq Chambres dites Chambres de l'Édit, pour protéger les protestants dans leurs procès contre des catholiques ou inversement. Elles servaient de Cours d'Appel et, en cas de partage égal des juges, elles devaient en appeler elles-mêmes aux Chambres de l'Édit à Paris ou à Rouen, où les juges protestants étaient minoritaires, avec un dernier recours possible au Conseil Privé du roi. Les trois Chambres du Sud (Bordeaux, Toulouse, Grenoble) avaient la particularité de compter autant de juges protestants que catholiques. La Chambre du Languedoc avait juridiction sur huit départements actuels et allait de Carcassonne au Puy en passant par Toulouse, Montpellier, Nîmes, Mende, Privat, région qui comptait 300.000 réformés. Au lieu de situer cette Chambre à Toulouse, on préféra sagement la situer en pays protestant, d'abord à Lisle-sur-Tarn, puis à Castres dans le Tarn, au sud d'Albi. Elle permit le retour des catholiques dans la petite ville et la cohabitation pacifique des deux communautés.
Cette Chambre a laissé le plus grand nombre d'archives (518 registres) lesquelles ne furent classées qu'en 1984, ce qui a enfin permis cette première étude d'ensemble. St. Capot, archiviste à Limoges, publie ici sa thèse de l'École des Chartes. Non content d'étudier les procès, il s'est proposé une vue d'ensemble de cette question complexe et divise son travail en quatre volets: 1) Le contexte historique de cette création originale, 2) Les structures de l'institution avec l'ensemble de ses fonctions et les compétences de la Chambre, 3) La procédure judiciaire, son activité, ses blocages, les recours à Paris-Rouen et au Conseil Privé, les enjeux politiques de ces procès, 4) Enfin l'étude sociale du milieu des magistrats: position sociale, fortune, alliances, pratiques religieuses et culturelles.
L'A. constate que cette Chambre a fonctionné à la satisfaction générale jusqu'en 1629 (prise de La Rochelle), date de l'effondrement politique et militaire des protestants. C'est alors que les désaccords ont vraiment commencé et qu'il fallut souvent recourir au Conseil Royal, lequel appliquait la politique du roi, laquelle se fit de plus en plus sévère avec Louis XIV. Alors que les juges protestants étaient stables, les juges catholiques étaient renouvelés chaque année par le Parlement de Toulouse désireux de bien marquer sa volonté de considérer cette Chambre comme une de ses dépendances pour la résorber un jour, ce qui eut lieu en 1679, six ans avant la Révocation de l'Édit de Nantes. Au total, on peut donc affirmer que la Chambre de Castres fit du bon travail pendant 50 ans et que le climat se modifia peu à peu par la suite.
Le livre apporte aussi 30 documents, les notices biographiques des magistrats avec leur carrière et leurs relations, les tableaux généalogiques de cinq famille ayant fourni au moins deux magistrats, les listes de magistrats catholiques de chaque session et l'index des noms de lieux et de personnes. B. Barbiche, professeur de l'A. et spécialiste de la question, juge le livre «un modèle d'histoire des institutions». - B. Clarot, S.J.

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