La Foi et la Raison. Sur les croyances, le christianisme et la mystique

Yves Labbé
Théologie - Recenseur : Jean Radermakers s.j.
Voici l'antidote rêvé au livre précédent. L'excellente collection Pierres d'angle fait oeuvre de haute vulgarisation en rendant accessibles à de nombreux lecteurs les avancées de la réflexion et de la méthode concernant des thèmes d'anthropologie, de religion, de politique. Elle présente ici l'oeuvre d'un philosophe et théologien bien connu, depuis dix ans professeur à la Faculté de théologie catholique de l'Université Marc Bloch de Strasbourg. Parmi ses principales oeuvres, citons Humanisme et Théologie (cf. NRT 97 [1975] 781s.), Le sens et le mal (cf. NRT 105 [1983] 735s.), Essai sur le monothéisme trinitaire (1987), Le Noeud symbolique (1997), le Petit dictionnaire des philosophes de la religion (cf. NRT 121 [1999] 458). De ces études, généralement difficiles, l'A. a tiré ce petit volume qui est comme un condensé de sa démarche. Le premier chapitre nous fait réfléchir sur «le sens des symboles» à partir des formes primordiales de l'imaginaire sensible et du formalisme culturel.
Ce préalable étant établi, il passe à «la foi et sa doctrine», où il situe «la norme: Jésus Christ, Seigneur et Sauveur» face à la position de Hegel, avant de reconnaître la signification de la pluralité des églises. Il passe ensuite à la difficile question de «l'autorévélation de Dieu» avec les corollaires de sa manifestation et de sa communication. Il étudie dans un quatrième chapitre les concepts théologiques, en notant les résistances qui se font jour à leur endroit et le rôle de la théologie avec ses exigences. Suivent plusieurs chapitres sur «l'apophatisme» dans le christianisme, et notamment à propos de la Trinité et en théologie des religions. Un huitième chapitre réfléchit la notion de religion et le passage de la pluralité à la singularité: institution de la religion et son sens. Un dernier chapitre peut alors s'expliquer sur les échanges et dialogues oecuméniques et interreligieux. Une conclusion résume avec pénétration le propos de l'ouvrage et les rapports multiples entre les différents chapitres. Relevons une phrase essentielle: «Le concept théologique (…) est la forme accomplie d'un contenu d'expérience et d'interprétation qui, au milieu de la communion des croyants, vient de la tradition du témoignage apostolique rendu à Jésus le Christ. En outre, la forme conceptuelle ne s'impose jamais absolument à la théologie. Au contraire, elle se sait dépassée dans le moment même où elle s'achève» (p. 303).
Et si toutes les croyances n'étaient que des fables particulières d'une foi universelle en l'ineffable? À moins que la reconnaissance d'une médiation universelle et unique de Jésus Christ dans le salut n'engage l'immédiateté universelle de l'Esprit et l'ultime unicité du Père. Il nous laisse sur une considération à méditer: «La foi chrétienne en Jésus, celle qui croit en lui en croyant qu'il est le Verbe de Dieu incarné, crucifié, mort, ressuscité, reconnaît en lui, oui en lui, une détermination universelle et unique du salut» (p. 313). L'itinéraire réflexif dans lequel nous embarque l'A. frappe par sa cohérence interne et la profondeur de sa visée. Il demande une attention soutenue et un esprit délié. Nous lui savons gré d'oser penser l'engagement de la foi de manière radicale, et de l'intérieur de la théologie chrétienne. Une pensée pleine de santé mentale et d'espérance. Juste ce qui manquait à la réflexion de J. Kamp. - J. Radermakers, S.J.

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