La naissance de la Mardité. * Une théologie politique à l'âge totalitaire: Pie XI (1922-1939)

F. Bouthillon
Histoire - Recenseur : Bernard Joassart s.j.
«Comment peut-on être persan?», s'interrogeait Montesquieu. «Comment peut-on écrire ainsi l'histoire?», pourrait-on se demander au terme de cet ouvrage. Car, au fil de la lecture, on en arrive à se dire qu'il tient à la fois des plus belles pages de Michelet - les plus âgés se souviendront du mémorable récit «Louis XIV enterre un monde» reproduit dans les vieux Lagarde et Michard -, du film de B. Tavernier, «Que la fête commence!», ou encore des romans d'Alexandre Dumas, le tout assaisonné d'une ironie qui amuse à plus d'un détour, tout autant qu'elle laisse parfois pantois. Sans parler du titre qui, à tout le moins, intrigue. Et en définitive, surgit la question: vrai? faux? ou les deux à la fois?
Thèse de l'A. Jusque presque la fin de son pontificat, Pie XI pratiqua le consalvisme, hérité de ses prédécesseurs, même les plus intransigeants, avec un art consommé. Après Hitler, Staline aurait pu figurer au tableau de chasse des concordats, s'il en avait manifesté le désir. Pourquoi pas le diable, tant qu'on y était? Jusqu'au jour du réveil, où les accommodements se révélèrent impraticables. Ou, pour le dire avec les mots de l'A.: «Pie XI a sauvé son âme. Il a commencé en continuateur consalviste de l'augustinisme politique, il a fini en adversaire des totalitarismes» (p. 303). Et vint Pie XII, qui semble avoir oublié la voie que lui avait tracée son ancien patron…
Qu'en penser? C'est ici que les choses sérieuses commencent. Ou plutôt, quel intérêt à lire ce livre qui n'est vraiment pas «d'allure assez bollandiste» (p. 20)? À se rappeler sans doute que la Révolution française instaura une coupure. À se rappeler que le libéralisme, avec les mêmes mots que le christianisme mais au contenu souvent fort différent, fut peut-être la plus étrange et la plus rude séduction jamais exercée sur l'esprit humain, et que ses descendants, légitimes ou bâtards, engendrèrent le meilleur comme le pire. À se rappeler qu'il ne sera jamais aisé pour le catholicisme de discerner le bien et le mal à l'intérieur de la Cité. Saint Jean n'avait-il pas déjà dit que ses disciples étaient dans le monde sans être du monde? Une position pour le moins inconfortable… - B. Joassart, S.J.

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