Le diaconat. Un ministère menacé ?

Jacques Tyrol
Théologie - Recenseur : Olivier Collard

Jacques Tyrol, psychologue et diacre permanent du diocèse de Lyon dresse un portrait-robot du diaconat permanent en France, sans aucune prétention scientifique ni velléité d’exhaustivité, de l’aveu même de l’A. qui a interrogé 36 diacres sur les quelque 300 que compte le pays. Ils parlent de leur appel, de l’impact du diaconat sur leur vie de famille et leurs relations professionnelles ainsi que de leur vie de prière.

Dans une deuxième partie, l’A. expose la diversité des ministères de ces diacres, principalement dans l’engagement social et caritatif. Enfin, il tente dans la dernière partie de distribuer les bons et les mauvais points à l’Église, qu’il souhaite moins prosélyte, mais davantage spirituelle et ouverte aux situations de fragilité et d’exclusion. Après un passage obligé par la critique des abus sexuels et du cléricalisme, il s’interroge sur la place du diaconat dans l’Église, 60 ans après Vatican ii.

Ministère du seuil, point de rencontre entre l’Église et le monde, Jacques Tyrol décrit le diaconat comme étant l’incarnation de la pensée des Pères conciliaires et de l’Esprit du concile. Mais qui sait si ces derniers imaginaient que le diaconat allait finalement rencontrer davantage de succès dans les pays missionnaires en mal de vocations que dans les pays de mission ?

L’A. affirme que le diaconat permanent a atteint l’âge de maturité, mais le tableau qu’il dépeint laisse plutôt penser que ce ministère peine encore à sortir de ses maladies de jeunesse et à dépasser les oppositions entre demi-prêtres et super-laïcs, engagement social et service liturgique, bleu de travail et dalmatique, grâce sacramentelle et cléricalisme, périphéries et marges de l’Église, réformisme et conservatisme, des oppositions entre Marthe et Marie que l’Église a toujours su dépasser, sur la longue histoire.

Ce n’est nullement imputable à l’A. qui apporte dans cet ouvrage une pierre à la réflexion sur l’ecclésiologie du diaconat permanent mais on est interpellé en lisant que 50% des diacres déclarent qu’ils demanderaient à être ordonnés prêtres si l’Église le permettait et que plusieurs peinent à accepter leur état clérical, voire déclarent regretter leur ordination.

Ce livre a donc le mérite de nous inciter à questionner le discernement des vocations et le profil des diacres permanents et se garder de cléricaliser trop vite des travailleurs sociaux catholiques ou des aspirants sacristains, au risque d’en faire des clercs malgré eux ou des prêtres manqués. D’autant que face à la grande hétérogénéité des témoignages qui manifestent la diversité et la richesse des manifestations concrètes du diaconat, on ne peut faire l’économie de s’interroger sur la solidité de la formation spirituelle et théologique des diacres permanents.

Mais surtout, cet ouvrage permet de prendre conscience de l’urgence pour l’Église de clarifier ce qui est vraiment spécifique au diaconat permanent et d’approfondir ses dimensions spirituelles, ecclésiologiques et charismatiques, mais aussi sa fonction concrète dans l’Église d’aujourd’hui et de demain. Car si le diacre n’a pas le monopole du service dont il est le signe, il serait dommage de réduire trop vite la triple diaconie de la liturgie, de la Parole et de la charité au service de l’autel, au témoignage d’une vie chrétienne et à l’action sociale.

Voilà en tout cas un état des lieux sans prétention, agréable à lire, qui ne manquera pas de susciter un questionnement fécond sur ce beau ministère. — O. Collard

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