Ce pourrait être – ce voudrait être, pour certains – l’avenir du livre : un ouvrage en auto-édition – c’est-à-dire pas toujours très bien édité (p. ex., dès les premières pages : 742 œuvres référencées sur la couverture, 741 sur la page de garde) – comportant toute une série de pages web qui sont censées illustrer le propos, sauf que – comme chacun a pu déjà en faire l’expérience – ces liens hypertexte renvoyant à des sites internet ont parfois une vie très éphémère. Je m’en tiens ici pour la forme, même s’il y aurait tant d’autres choses à dire. Quant au contenu, on ne peut certes pas se plaindre du manque de données fournies : on a là une sorte de big data sur Esther. Encore doit-on s’y retrouver dans ce fouillis et vérifier l’exactitude de certaines de ces informations. Ce qui fait plutôt défaut, outre la rigueur, ce sont les outils d’analyse et de compréhension. Est-il, p. ex., justifié de qualifier le livre d’Esther de « palimpseste » avec l’explication suivante : « le texte initial ayant été, selon les exégètes, soit réduit soit enrichi de passages à connotation religieuse » (p. 15) ? Qu’est-ce qu’un lecteur, même informé, comprendra à une phrase telle que celle-ci : « La Gemara du Talmud de Babylone contient en 7,a des commentaires sur l’origine du Purim… » (p. 22) ? Que signifie un « chiasme religieux » (p. 42) ? Etc. Bref, pour une histoire de la réception du livre d’Esther dans l’art et la littérature, on préfèrera se reporter, sans hésitation, à la thèse d’Elisabetta Limardo Daturi, Représentations d’Esther entre écritures et images, Bern, Peter Lang, 2004 ou encore au livre de Marc Bochet, Esther ou la tentation de la vengeance génocidaire, Paris, H. Champion, 2012, aucun des deux n’étant repris dans la bibliographie (truffée d’erreurs) finale (p. 673-684). Aussi décevant soit le résultat, cet OVNI imprimé constitue paradoxalement un véritable encouragement pour tous les éditeurs qui veulent continuer à publier des ouvrages sérieux et de qualité.